mercredi 7 décembre 2011

Quel fédéralisme pour l'Union européenne?


Le second discours, dit de Toulon, prononcé 1er décembre par le Président français Nicolas Sarkozy se veut un programme pour sauver l'Euro et résoudre, de façon plus ou moins définitive, la question des dettes publiques de l'Union Européenne (UE). En fait, et cela commence aujourd'hui à être une idée répandue, la solution passe par plus d'intégration des Etats au sein de l'UE. Si les marchés financiers ont tant de prise sur les conditions d'emprunt des pays de l'UE c'est, en grande partie, à cause du peu de solidarité qui existe entre ces pays. Au lieu de présenter un front commun, d'être solidaires, ces Etats se présentent en ordre dispersé face aux attaques répétées des spéculateurs. La meilleure preuve que la situation économique d'un pays est peu en cause dans les raisons de ces attaques, c'est l'observation des récentes difficultés de l'Allemagne à emprunter sur les marchés financiers. Aucun membre de l'UE ne sera épargné tant qu'il restera une ouverture pour le profit des spéculateurs de la finance internationale.

Dans ces conditions, il est urgent de solidifier l'Union, de la mettre en position de force face aux attaques dont ses membres sont l'objet. La seule et unique voie pour le faire est de renforcer le fédéralisme de l'Union. Mais il faut être conscient qu'il n'existe pas une voie unique pour le faire. Le fédéralisme actuel est basé sur un gouvernement européen intergouvernemental qui impose l'unanimité des votes pour pouvoir adopter une décision importante. C'est un "fédéralisme faible" qui a montré ses limites dans la crise actuelle. A l'autre extrémité de l'échelle figurerait un "fédéralisme fort" qui serait caractérisé par un gouvernement fédéral européen issu du suffrage universel des nations de l'UE. C'est un fédéralisme du type de celui des Etats Unis d'Amérique. Visiblement ce type de fédéralisme fait peur a beaucoup d'Européens qui craignent d'y perdre leur identité et une part de leur souveraineté... Sur le plan des principes, on voit mal comment il serait possible de construire l'UE sans effectuer des transferts de souveraineté des Etats membres vers la structure gouvernementale européenne. Il ne s'agit pas de « perte de souveraineté », comme on l'entend dire trop souvent, mais bien de transfert de souveraineté. Dans ce dernier cas, il n'y a donc pas de perte mais simplement un transfert vers des responsables placés au niveau de l'Union.

La voie tracée par Nicolas Sarkozy dans son récent discours se situe entre ces deux extrêmes. C'est un "fédéralisme intergouvernemental" dans lequel les décisions ne requièrent plus l'unanimité mais seulement une majorité qualifiée au sein de « l'Intergouvernement ». C'est une voie originale qui semble permettre de gagner sur les deux tableaux : chaque membre de l'UE conserverait son identité en continuant notamment à élire en son sein un responsable politique au plus haut niveau (President de la République, Chancelière,...) pour le représenter et d'autre part, la solidarité entre les membres de l'Union serait renforcée en efficacité par le fait que les décisions de gouvernement serait votées à la simple majorité qualifiée. Il n'en demeure pas moins un problème de taille dans cette approche originale : quelle serait la voix de l'Europe ? Qui serait mandaté pour parler au nom de l'UE ? Le President Sarkozy n'a malheureusement rien dit à ce sujet. Peut-on continuer à utiliser un mécanisme tournant de présidence comme cela est actuellement le cas ? Cette façon de faire semble diminuer le poids de l'Union, sa capacité à se faire entendre. Il me semble qu'une possibilité serait d'élire au suffrage universel, pour une durée conséquente ( 4 ans par exemple), un Président de l'Union, désigné par l'ensemble des citoyens de l'UE et choisi parmi les membres de « l'Intergouvernement ». Des mécanismes appropriés feraient en sorte que cette élection tienne compte des poids démographiques respectifs des pays membres et assureraient une rotation obligatoire, de sorte qu'un pays qui quitterait la présidence de l'Union ne pourrait pas être réélu immédiatement pour plus d'un mandat. Il est, en tous cas urgent que les dirigeants de l'UE s'accordent sur la façon de renforcer la solidité de l'Union afin de pouvoir, enfin, se pencher sur les vrais problèmes des citoyens européens que sont le chômage (celui des jeunes notamment), le pouvoir d'achat, l'éducation, la santé, la culture et les langues....