La démocratie occidentale, dite « représentative », est en bien piteux état. C'est un constat que chacun peut faire sans difficulté. Quelques exemples : dans l'Union Européenne, le tandem Sarkozy-Merkel s'arroge, sans en avoir été démocratiquement chargé, la direction de la lutte contre la crise de la dette au mépris des autres Etats de l'Union et des instances européennes; en Russie le tandem Poutine-Medvedev s'attribue en alternance les rôles de Premier ministre et de President, élections après élections; en Grèce les élus du peuple se font cracher dessus à chacune de leur apparition publique; partout dans le monde dit « libre », les taux d'abstention aux différentes élections battent des records; partout la représentativité des partis politiques est en chute libre... Dans les pays les moins riches, la situation de la démocratie est encore plus périlleuse avec, notamment, des chefs d'Etat qui accaparent le pouvoir à vie au profit de leur clan...
Dans le même temps, on observe une montée en puissance des grands mouvements citoyens qui semblent avoir trouvé un moyen d'intervention efficace sur la politique de leur pays, en descendant dans les rues et en manifestant jusqu'à la satisfaction de leurs souhaits. Les récentes révoltes dans le monde arabe en sont une illustration remarquable. On le constate ainsi en Egypte où, après avoir chassé le President Moubarak, et après avoir connu une période d'accalmie, les Egyptiens sont aujourd'hui de nouveau sur la Place Tahrir pour réclamer, cette fois, le départ du pouvoir des militaires, estimant n'avoir pas encore obtenus satisfaction sur les questions essentielles qui ont motivées leur révolte.
Le mouvement transnational des « Indignés » en est un autre exemple. La rue est devenue le lieu privilégié de l'expression citoyenne. La côte des politiciens, telle que révélée par les sondages d'opinion, n'a jamais été aussi basse partout dans les démocraties occidentales.
Souvenons nous : dans la Grèce antique, vers le VIè siècle avant Jésus Christ, les Athéniens créent la « démocratie directe » en permettant la discussion des lois par le peuple sur la place publique, sur « l'Agora ». A Athènes, toutes les décisions politiques étaient prises par la majorité simple dans des assemblées nombreuses jusqu'à plusieurs milliers de citoyens après un débat de quelques heures. C'était une démocratie d'assemblée et non pas parlementaire. Ainsi le rôle de la parole était très important, non
seulement pour discuter les lois, mais aussi au tribunal pour se défendre. Tout devait être publié, oralement ou par écrit. Les assemblées n'étaient pas seulement des organes de décision, mais un forum où un grand nombre de questions étaient portées à la connaissance du plus grand nombre possible de citoyens. Quand les travaux étaient terminés, les discussion se poursuivait à l'Agora et dans les boutiques populaires. l'Agora, édifiée au nord-ouest de l'Acropole, constituait le centre administratif, religieux et commercial de la cité. La démocratie athénienne était aussi caractérisée par une absence de parti politique.
Imaginons : si demain les responsables politiques faisaient preuve de maturité en acceptant, sans la réprimer dans le sang (comme on peut le voir aujourd'hui, par exemple, en Syrie), l'expression politique des citoyens par des rassemblements de masse dans l'espace public, n'aurions nous pas retrouvé là une forme de démocratie directe ? Cette « nouvelle démocratie » pourrait d'ailleurs, avec profit, être accompagnée de la fin des privilèges exorbitants accordés aujourd'hui aux responsables politiques. En d'autres termes, les politiciens actuels seront-ils assez mûrs pour accepter de perdre une grande partie de leur pouvoir et des avantages qui s'en suivent pour redonner la parole au peuple? Ils peuvent, c'est sûr, se détourner de cette perspective et poursuivre sur la lignée actuelle mais alors, ils prendront le risque d'une remise en cause brutale de leurs prérogatives... Peut-être que nous aurions là un moyen de redonner confiance aux citoyens tout en régénérant la vie politique en lui insufflant un nouveau dynamisme puisé directement à la source du peuple.