jeudi 31 mai 2012

Différences culturelles

Il est frappant pour un citoyen français qui suit quotidiennement les évènements qui se déroulent au Québec autour du mouvement de protestation des étudiants contre l'augmentation des droits de scolarité, de constater combien les choses sont différentes ici par rapport à ce que l'on connait en France dans des situations semblables. Sans vouloir formuler un quelconque jugement de valeur sur les différences de comportement entre les Québécois et les Français, il est très surprenant de voir combien le calme demeure une constante comportementale du coté américain de l'Atlantique. Les débats télévisés, par exemple, ne dérapent jamais, les interlocuteurs (étudiants, experts, politiciens, journalistes...) conservant leur calme en toutes circonstances. Il est plus qu'étonnant de voir, comme cela s'est passé dans la ville de Québec le soir du 28 mai, les personnes qui étaient massées devant le lieu où se tenaient les négociations entre le gouvernement et les leaders étudiants, se faire arrêter par la police, une par une, dans le plus grand calme. Plus de 80 personnes furent ainsi arrêtées sans qu'à aucun moment la foule des manifestants présents n'interviennent pour entraver les opérations policières. Bien sûr il y a eu quelques échauffourées avec les forces policières lors de certaines manifestations de rue, mais il faut reconnaitre que dans la majorité des cortèges de rue il n'y eu aucune violence. Le sérieux dont font preuve les leaders étudiants au cours de leurs interventions, ne se laissant jamais emporter par la colère ou la passion est vraiment surprenant. Il y a sans doute là une constatation explicable par les différences culturelles entre la France et le Quebec. Le célèbre flegme des Anglais semble avoir laissé quelques traces en Amérique du nord... Il est vrai que la présence française n'a pas été suffisamment longue (un siècle et demi sur 400 ans d'histoire) pour que la latinité s'impose...

dimanche 27 mai 2012

Contradictions éducatives

Lors des récents évènements au Québec, et particulièrement au début des manifestations des étudiants et des collégiens (le mouvement de grève a été déclenché le 13 février 2012), on a pu constater qu'une partie importante de la population québécoise ne soutenait pas les étudiants. Ainsi, selon un sondage CROP-Le Soleil-La Presse (Une agence de sondage et deux quotidiens québécois) publié le 31 mars, une majorité de Québécois (61%) sont d'accord avec la hausse de 1625$ en cinq ans, contre une minorité (39%) en désaccord. «Les gens plus âgés sentent qu'ils font leur part, dit M. Rivest (Directeur de l'Agence de sondage CROP). Ils ont moins de proximité avec les étudiants. Ils se disent : "J'ai contribué à la société. J'ai payé des impôts toute ma vie, c'est à leur tour de payer."». Parmi les arguments évoqués par les uns ou les autres revenait souvent le fait que les étudiants se comportaient comme des « enfants gâtés », des « petits rois » qui ne voulaient en faire qu'à leur tête... Le Gouvernement québécois, lui-même, alimentait cette argumentation en accusant les étudiants de « vouloir refiler la facture (de l'augmentation du financement des universités) à la population » sans vouloir prendre leur part de cette facture. Parallèlement, chacun peut constater combien les jeunes enfants sont adulés, protégés, au Québec. Pas question de punir, même légèrement, un enfant à l'école sans que les parents (les mères surtout) n'interviennent immédiatement pour demander des comptes aux enseignants. Un récent très beau film du réalisateur québécois Philippe Falardeau intitulé « Monsieur Lazhar » traite de façon magistrale cette question. Les enfants sont généralement hyper protégés par leurs parents pendant leur enfance au point qu'il est fréquent de voir des enfants munis de casques alors qu'ils jouent au tricycle ou à la trottinette.... De moins en moins d'enfants vont à l'école à pied car les parents craignent de les laisser marcher loin de leur regard protecteur. Une journaliste qui avait laissé son fils de 9 ans prendre le métro tout seul a été trainée dans la boue,... Il serait facile de multiplier ce type d'exemple. Dès lors, il me semble exister une certaine contradiction, chez les adultes, dans le fait d'une part, de ne pas soutenir massivement les étudiants dans leurs revendications contre l'augmentation des droits de scolarité, de les livrer sans remord aux matraques des brigades anti-émeute de la police et, d'autre part, dans le fait d'hyper protéger les jeunes enfants. Tout se passe donc comme si les enfants, une fois devenus adolescents et adultes, ne méritaient plus de bénéficier de la protection de leurs parents. Même si on admettait les critiques à l'encontre des étudiants, il n'est guère difficile de déduire qu'en éduquant les jeunes enfants comme des « petits empereurs » il ne serait pas anormal de les voir, ensuite, se comporter en enfants gâtés... Certains pourront objecter qu'actuellement, les luttes des étudiants bénéficient d'un soutien plus massif de la part de la population. Cela est vrai, et le nombre de manifestants toujours en augmentation dans les cortèges nocturnes ou diurnes est là pour en attester, mais on ne doit pas oublier qu'il a fallut le vote de la « loi spéciale 78 » (loi restreignant le droit de manifestation au Québec) par le Parlement du Québec, le 12 mai 2012, pour voir enfin une grande partie de la population descendre dans la rue avec les étudiants. Il faut souligner que cette loi touche tout le monde, adultes et étudiants...

mardi 22 mai 2012

A propos du problème grec

Le départ de la Grèce de l'Union Européenne (UE) serait une preuve de faiblesse et du peu d'avenir du projet européen. En effet, que peut-on penser d'une organisation qui, pour résoudre une difficulté n'a pour seule solution que de se débarrasser de la partie qui lui pose difficulté? Si tel était le cas, alors on serait en droit de s'interroger sur le sérieux et sur la solidité du projet Européen. Demain, la porte serait ouverte au rejet de l'UE de tout élément qui poserait problème. Dès lors, qu'est ce qui empêcherait de sortir de l'Union la population des Roms, par exemple? La perte de la Grèce serait la preuve d'un manque flagrant de solidarité au sein de l'Union. Cela serait d'autant plus vrai que l'on sait combien la partition d'un pays peut susciter de résistance de la part du pays concerné. L'histoire a montré que quelque fois cette résistance pouvait aller jusqu'au déclenchement de conflits armés... Il faut aussi craindre que la séparation de la Grèce et de l'UE soit la porte ouverte à d'autres départs. Demain le tour de l'Espagne, puis du Portugal, de l'Italie, de la France... pourrait venir. Mettre le doigt dans cet engrenage ne permettrait pas de savoir où et quand ce processus infernal serait susceptible de s'arrêter. Il est fondamental que la Grèce demeure au sein de l'Union car ce maintient est une mesure de la viabilité du projet européen, de sa pérennité. Il faut aussi prendre en compte le fait que la dette grecque ne représente guère plus de 2% du PIB de l'UE. Ne pas être capable de régler une si petite difficulté serait un extraordinaire aveu d'impuissance de l'Union... Face aux risques que pourraient engendrer le départ de la Grèce, compte tenu de la relative facilité que l'UE aurait à résoudre ce problème, il est évident que la meilleure solution, voire la seule acceptable, serait de tout faire pour que ce pays demeure au sein de l'Union. Ceux qui prendraient le risque d'engager l'Union sur une autre voie endosseraient une très lourde responsabilité devant l'Histoire....

vendredi 18 mai 2012

Loi spéciale au Québec

Une chose m'a souvent frappé depuis mon arrivée de France à Montreal : la différence culturelle entre les pays sous influence anglo-saxonne (comme l'est le Québec, plongé dans un environnement culturel anglophone) et ceux de culture latine (comme la France) : dans les pays latins, il n'est pas rare de voir la population braver les lois et affronter les forces de l'ordre à l'occasion de l'expression d'un mécontentement. Au Québec, j'ai pu observer, souvent avec surprise, un grand respect de la loi par la population. Lors de la grève des infirmières en 1999, par exemple, il avait suffit au gouvernement de promulguer une loi spéciale infligeant, notamment, des pénalités financières importantes aux grévistes pour que ceux-ci abandonnent leur mouvement. J'avais aussi été surpris par l'isolement des infirmières, la population ne manifestant généralement aucune solidarité à ce mouvement. Il est clair qu'en proposant, le 17 mai 2012 à l'Assemblée Nationale du Québec, une loi spéciale à l'encontre du mouvement de protestation des étudiants, le gouvernement Charest espère renouveler l'opération menée à l'encontre des infirmières et mettre ainsi fin au mouvement protestataire des étudiants. Je ne pense pas que, cette fois, la manoeuvre aura du succès. En effet, entretemps les peuples ont appris des "printemps arabes". Si, dans un contexte dictatorial autrement plus difficile à vivre que ne l'est l'environnement politique au Québec, les peuples ont été capables de vaincre des dictatures, alors pourquoi, ici, dans un contexte plus facile, ne serait-il pas possible de faire tomber le gouvernement ? Je crois que les jeunes ont bien intégré cette nouvelle donnée et l'adoption de la fameuse loi spéciale risque fort de ne faire qu'aggraver la situation en re motivant les manifestants et conduire le gouvernement du Québec à sa perte... D'ailleurs, en proposant aux députés cette loi, le Gouvernement du Québec vient de contribuer à re orienter la lutte des étudiants vers un combat plus général pour la démocratie et contre l'arbitraire gouvernemental. Ce faisant, il permettra l'élargissement du mouvement à d'autres catégories sociales qui n'accepteront pas de voir menacer la liberté d'association, la liberté d'expression et de manifestation...

mardi 15 mai 2012

Le choc des images

Pendant que la télévision nous montrait le nouveau President de la République Française rendant hommage, le 15 mai, à Paris, à Jules Ferry le père de l'instruction publique laïque, gratuite, et obligatoire, cette même télévision, sur une autre chaine, nous montrait des images d'une charge policière contre les étudiants grévistes devant le Collège Lionel-Groulx à Sainte-Thérèse au Québec. En effet, l’escouade antiémeute de la Sûreté du Québec a été appelée en renfort ce matin sur le terrain de ce Collège, situé dans les Laurentides, où une centaine de manifestants empêchaient 53 étudiants de se rendre à leurs cours. Depuis 14 semaines maintenant, le Gouvernement québécois du Premier Ministre Jean Charest est contesté par les étudiants et les collégiens pour avoir pris la décision d'augmenter les droits de scolarité dans les universités. Les manifestants refusent de se plier à cette exigence et réclament la gratuité ou, au moins, le gel de ces droits. Il y a parfois des coïncidences évènementielles redoutables... D'un côté de l'Atlantique, un président de la république rend un hommage appuyé à l'instruction publique, à ses personnels et, au rôle primordial de cette vénérable institution pour la formation des cadres de la Nation. Il insiste sur la priorité qui doit être donnée à la formation par rapport à la finance. François Hollande a tenu, pendant cette première journée de son quinquennat, à souligner symboliquement l'importance de l'école, de l'université, des grandes écoles, des professeurs et des chercheurs pour assurer un développement harmonieux du pays. Il a indiqué notamment dans une allocution : "Je veux que [l'école] retrouve tous les moyens d'être fidèle à sa vocation, je veux lui redonner confiance en elle-même, sa foi dans ses propres capacités, sa volonté d'être conforme à notre histoire et à ce qu'exige notre avenir. L'école a besoin de réformes, elle attend aussi de la considération de la nation et elle appelle le soutien de l'Etat." Ce n'est pas en réprimant les étudiants et les collégiens que l'on fait avancer un pays mais bien en  aidant la jeunesse à s'instruire, à progresser, en favorisant la diffusion des savoirs, l'innovation et la recherche. Miser sur la formation des jeunes, en période de crise notamment, c'est préparer l'avenir, c'est se donner les moyens de sortir de l'impasse dans laquelle le monde a été placé par la cupidité des forces néolibérales. Ce qui est vérité d'un côté de l'Atlantique ne peut être fausseté de l'autre côté...

mardi 8 mai 2012

Quel changement pour la France ?

Quel changement pour la France ? La France est débarrassée de celui que certains n'hésitaient pas à surnommer " l'Agité de l'Elysée". Peut-on, pour autant, penser que les jours à venir seront meilleurs que ceux du passé ? Pour se convaincre qu'il n'en est rien, il suffit de se reporter cinq ans en arrière au moment où Nicolas Sarkozy venait de battre Ségolène Royal. L'espoir d'une partie du peuple français était immense et les promesses du candidat Sarkozy avaient fait mouche : amélioration du pouvoir d'achat, travailler plus pour gagner plus, abaissement du taux de chômage a 5%.... On a pu, malheureusement, constater par la suite combien ces promesses n'étaient que paroles en l'air. Il en va fréquemment ainsi, chaque élection présidentielle est suivie de déceptions multiples. Ce fut le cas pour d'autres présidents dont F. Mitterand, J. Chirac... La désillusion semble inéluctable... Aujourd'hui, à la suite de cette nouvelle élection, la raison impose de se souvenir de ces déceptions récurrentes, cela d'autant plus que la France se trouve confrontée à une crise mondiale qui ne facilitera pas les choses... Pour réussir et donc, pour minimiser le nombre de citoyens déçus à l'issue de son mandat de cinq ans, F. Hollande devra affirmer très vite ses intentions. Il devra rapidement poser des actes sans équivoque notamment dans le domaine de l'emploi. Les leviers sur lesquels il peut s'appuyer ne sont pas nombreux et il y en a essentiellement un, il se nomme : Europe. Il faudra développer l'intégration européenne afin, dans un premier temps, de permettre aux jeunes de travailler là où se situent les gisements d'emplois et, ensuite, promouvoir des projets européens susceptibles de créer des emplois. Ces créations devront, en outre, se situer majoritairement dans le champ du développement durable et solidaire et ne pas être profitables à la seule finance internationale. La croissance qui devra être recherchée, non pas pour la France seule, mais pour l'ensemble des pays membres de l'Union Européenne (UE), devra s'appuyer surtout sur ce que certains désignent par « économie verte » et sur l'économie sociale. Elle ne devra pas faire le jeu des grandes puissances de la finance internationale, ni des grandes entreprises multinationales qui sont souvent de mèche avec les grands financiers. Il faudra favoriser les PME, l'initiative citoyenne, l'autoentreprise, le développement de produits durables ainsi que les services d'entretien et de maintenance qui leurs sont nécessaires. Il faut cesser de laisser à la seule Allemagne le bénéfice de l'exploitation du grand marché européen. La France, comme les autres pays de l'Union, doit pouvoir se prendre sa part, aussi équitablement que possible, de ce gisement d'emplois. Cela impose la mise en place, au sein de l'Union Européenne, de politiques nationales cohérentes et adaptées : priorité à l'apprentissage des langues, harmonisations fiscale, sociale, à la formation des jeunes,... Il n'y a pas d'autre issue pour les pays membres de l'Union Européenne que de renforcer leur solidarité et, pour cela, de mettre de côté leurs réflexes nationalistes exacerbées par la crise. Le drapeau derrière lequel nous devons désormais nous ranger, nous les citoyens de l'UE, c'est le drapeau européen. Les transferts (et non pas abandons) de souveraineté qui en sont la condition nécessaire, constituent le prix à payer pour sortir de la crise qui nous étreint. Le nouveau président ne devra jamais oublier qu'il est issu d'un parti socialiste et, qu'à ce titre, il a le devoir de s'occuper en priorité des citoyens les plus démunis et des classes moyennes. Pour tous ceux-ci, l'emploi est la condition première de la sortie de l'impasse personnelle dans laquelle ils sont enfermés. Prendre une autre direction le condamnerai à coup sûr à l'échec...