vendredi 24 décembre 2010

Communautarisme ou assimilation ?

Récemment, au cours d'une interview donnée au journal Le Monde en date du 12-13 décembre 2010, Henri Guaino, conseiller spécial du Président de la République française, indiquait que l'assimilation est le programme de la République. Il souhaitait, entre autre chose, s'opposer aux tenants du communautarisme qui, selon lui, attaque insidieusement les fondements de la République française.

Une nation, quelle qu'elle soit, ne saurait se développer harmonieusement si ses composantes culturelles ne vivent pas dans une certaine harmonie. Les effets de la mondialisation sont, en effet, aujourd'hui présents presque partout dans le monde. Parmi les conséquences qui en découlent, il faut souligner la création de mélanges, de plus en plus hétérogènes, de populations d'origines diverses. Aujourd'hui, il est devenu rare de trouver un pays dont la composition démographique et culturelle est homogène. Partout les cultures se côtoient, se métissent et, malheureusement, parfois, s'affrontent... Dans ces conditions deux possibilités d'évolution sociétale s'offrent aux nations :
Le choix d'un communautarisme de plus en plus marqué, c'est à dire, une évolution vers une situation dans laquelle les cultures se côtoient certes, mais sans trop se mélanger et dans laquelle, chaque groupe culturel sera susceptible de profiter d'un certain degré d'autonomie de gestion au sein de la communauté nationale. Cette façon de procéder peut donner lieu à des situations sociales stables si l'Etat se donne les moyens d'organiser les relations entre les communautés de façon à éviter, le plus possible, les conflits inter culturels. Cette orientation est généralement celle adoptée par les nations de culture anglo-saxonne.
L'autre approche est celle, dite d'assimilation. Elle ne reconnaît pas les communautés culturelles en tant que telles et met en place les mécanismes politico-administratifs capables de les amener à s'intégrer dans un moule commun à l'ensemble de la nation. Cette façon de faire est celle qui est choisie par la France notamment. A première vue, c'est une approche qui devrait poser moins de problèmes, au moins sur le long terme, dans la mesure où les groupes culturels se fondent tous dans un même moule. Elle apparaît donc mieux à même de produire une société harmonieuse... Cependant, à y regarder de plus près, on se rend vite compte que les choses sont plus complexes.
La première remarque concerne la culture nationale. Cette dernière ne peut être que la résultante du mélange des cultures des groupes qui se sont assimilés au sein de la nation. Elle profite de l'apport des différentes cultures qui sont en présence. Il suffit de se rappeler, par exemple, ce que les auteurs originaires de l'Outre-mer ont apporté à la France ne serait-ce que dans le domaine littéraire... Dès lors, toute tentative d'atténuation des cultures d'origines, avec l'objectif de les forcer à se fondre dans le creuset culturel national, risque d'entrainer une perte de vitalité, de créativité, pour la nation, celle-ci ne bénéficiant plus de l'apport original des composantes culturelles exogènes.
Sur un autre plan, l'assimilation jouit généralement d'une triste réputation. Ainsi aux Antilles et en Guyane, notamment, elle a été à la base de la justification de nombreuses dérives : interdiction de l'enseignement et de la pratique de la langue locale, le créole; falsification de données historiques, comme, par exemple, le fait d'enseigner aux écoliers antillo-guyanais que leurs ancêtres étaient des gaulois; déplacements massifs de population vers la métropole où elle venait renforcer la classe ouvrière... Cette dernière disposition étant souvent vécue comme une sorte d'émigration forcée. De façon plus générale, l'assimilation a permis, dans les régions ultra marines, de justifier la négation des cultures locales. En France métropolitaine aussi, l'assimilation n'a pas toujours eu bonne presse. Les phénomènes d'islamisation de la France, sont souvent perçus comme un échec de l'intégration (ou de l'assimilation) des musulmans par la République...

La position correcte semble, comme souvent, se situer entre les deux pôles extrêmes que constituent le communautarisme d'une part, et l'assimilation d'autre part. Il s'agit plutôt de permettre une insertion, aussi harmonieuse que possible, des communautés culturelles émigrantes au sein de la société d'accueil, tout en leur permettant de vivre leur culture à la condition qu'elles respectent les lois fondamentales de la République française. Cette façon de faire, ménageant à la fois les cultures exogènes et endogène, pourrait être désignée par Républicanisation, une désignation qui a le mérite de bien marquer l'adoption des lois républicaines par les émigrants sans, pour autant, exiger l'abandon de toutes leurs valeurs culturelles. Cette approche, bien sûr, pourrait amener la disparition de certaines pratiques culturelles, incompatibles avec la culture de la société d'accueil mais, en aucun cas, elle ne devrait mépriser, a priori, les façons de vivre des nouveaux arrivants.

Mettre en place la Républicanisation, nécessitera un changement profond des mentalités, tant dans le pays d'accueil que de la part des populations émigrantes. Il faudra, en effet, que le pays d'accueil soit suffisamment tolérant pour pouvoir accepter des pratiques inhabituelles de la part des nouveaux arrivants. Ces pratiques devront, évidemment, être conformes aux règles admises dans le pays d'arrivée. Il sera aussi important que les émigrants acceptent de modifier certains de leurs comportements, lorsqu'ils ne sont pas admissibles par la société d'accueil et aussi, qu'ils tolèrent des pratiques, de la part de leurs nouveaux concitoyens, qui pourraient leur sembler inadmissibles, si ces habitudes sont celles pratiquées dans leur nouveau pays.

Tous ces changements de mentalité et d'habitudes prendront du temps et ne pourront être réalisés qu'au travers de l'éducation parentale et scolaire. Il faudra également que les Gouvernements des pays incriminés se concertent afin de faciliter la mise en place de ce nouveau concept. Le Gouvernement du pays d'accueil devra impulser et coordonner la réalisation du changement au travers, notamment, de la réglementation administrative et de la loi. Les Gouvernements des pays de départ seront, au minimum, responsables de l'information des candidats au départ relativement aux nouvelles façons de vivre qui les attendent.

La Républicanisation pourrait ainsi faire que l'avenir de la mondialisation soit moins conflictuel qu'elle ne l'est actuellement et qu'elle l'a été par le passé...

mercredi 8 décembre 2010

Le nouveau Noël

Quelle belle fête que celle de Noël ! Elle permet aux familles de se rassembler, une action de plus en plus difficile à réaliser de nos jours. Mais elle est surtout l'occasion de procurer de la joie aux enfants. La tradition des jouets de Noël est toujours en vogue mais elle me semble avoir été quelque peu dévoyée. En effet, les enfants reçoivent déjà beaucoup de cadeaux pendant l'année, en diverses occasions, si bien que pour atteindre l'émerveillement au moment de Noël, il faut aujourd'hui leur offrir toujours plus de cadeaux et de plus en plus couteux. En outre, une sorte de concurrence s'établit entre les parents et amis, chacun s'évertuant à offrir le plus beau cadeau, celui qui emportera la palme auprès des enfants.... Tout cela aboutit à un énorme gâchis, peu éducatif par ailleurs. Les enfants se détournent très vite de ces jouets, qui ne correspondent d'ailleurs pas souvent à leurs souhaits, et très rapidement les relèguent au fond des armoires préférant.....regarder la télévision....
Sans glorifier le passé, souvenons nous de l'attente de Noël, à une époque où les jouets étaient rares et chers. Cette longue attente qui précédait la fête, ne donnait que plus de valeur aux rares jouets qui étaient offerts. Ces présents, pendant toute l'année qui suivait, constituaient un rappel du bonheur et des joies de Noël.

En agissant comme nous le faisons aujourd'hui, nous ne rendons pas service à nos enfants, nous contribuons a leur construire une mentalité de "petit empereur", d'enfant gâté, qui pourra avoir des conséquences graves, voir dramatiques, pour la famille et la société, une fois l'enfant devenu adulte. Il est utile de considérer ce qui se passe, en Chine, par exemple, où la politique d'enfant unique a donné naissance, lorsqu'ils étaient trop choyés, à une génération d'adolescents et d'adultes complètement asociaux. Au point que le pays a du faire appel à des maisons de redressement spécialisées pour traiter ces déviants et tenter de les ramener à des comportements plus corrects.

Noël est à l'origine une fête religieuse, une commémoration chrétienne de la Nativité. Mais aujourd'hui le Dieu devant lequel nous nous prosternons a changé de nom et de nature. Il s'appelle désormais "fric". Il faudra sans doute que la crise économique s'aggrave pour que nous puissions, faute de moyens financiers suffisants, revenir à des pratiques plus saines... Mais, une fois encore, nous aurons subi la loi de cette nouvelle idole....

mardi 7 décembre 2010

Tristes élections.

Les récents évènements autour de l'élection présidentielle en Côte-d'Ivoire ne peuvent que nous conduire à nous interroger sur la valeur et sur l'avenir du processus électoral dans le monde contemporain. Il est vrai que les difficultés se rencontrent surtout au sein des pays dit « en voie de développement » comme c'est, par exemple, aussi le cas actuellement en Haïti où l'élection présidentielle est entachée de fraudes multiples, ou encore en Egypte où l'emprise du Président Moubarak vient contrer l'expression libre de la démocratie... On ne peut, non plus, oublier la désignation du successeur du Président Omar Bongo au Gabon, ni celle du Président Kabila au Zaïre, ni les rumeurs qui circulent sur la succession du Président du Sénégal ou du Président de la Corée du nord... On pourrait allonger cette liste sans difficulté en considérant d'autres continents.

Cependant, il ne faudrait pas croire que ces maux affectent les seuls pays en développement. Les pays les plus riches rencontrent, eux aussi, des embûches sur le chemin de l'expression démocratique. Par exemple, les taux d'abstention, importants et répétitifs, qui apparaissent au moment des élections en constituent un témoignage (voir chronique du lundi 15 mars 2010 dans ce même blogue). En outre, même lorsque les électeurs prennent la peine de se déplacer en nombre suffisant, il est fréquent de constater, au bout du processus, que les parties en présence ne sont souvent différentiées que par des pourcentages de voix infimes. Tout se passe comme si, les choix de l'électorat se répartissaient quasi uniformément entre les partis ou les candidats en lice... Ainsi, même lorsque le processus fonctionne et qu'il n'est pas affecté par des perturbations (fraudes d'origines diverses, désintéressement,...), le résultat n'apparait guère probant.

Tout se passe donc comme si le processus électoral traversait actuellement une crise grave qui pourrait, si l'on n'y prend garde, le mener dans une impasse définitive et, à terme, le condamner. Il y a là une perspective extrêmement inquiétante sur laquelle les analystes politiques de tous bords devraient se pencher avec attention. En effet, faute de perspectives, la situation pourrait s'aggraver et déboucher sur une violence incontrôlable comme cela se passe, d'ailleurs, déjà dans certains pays...

On peut, certes, intervenir en agissant sur les causes multi factorielles de cette situation : la corruption, les promesses non tenues des candidats, la multiplicité des scrutins, le manque de leaders charismatiques, la disparition des idéologies, l'absence de grands projets, la sur information,... mais, même si cette action ne peut qu'être positive, elle risque de ne pas être suffisante pour enrayer le phénomène. Il importe aujourd'hui de réfléchir à des moyens d'intervenir directement sur le processus de consultation des citoyens afin de lui redonner de l'intérêt, de lui redonner vie... Il faut, à mon avis, être innovant pour être crédible. Il ne s'agit plus de colmater des brèches mais bien de reconstruire un dispositif électoral sain et vivant. Un processus susceptible de rassembler un maximum d'électeurs et capable de retrouver du sens auprès des citoyens de façon à diminuer les taux d'abstention et à éviter, le plus possible, la contestation post électorale. Il faut motiver l'électorat, le rassurer et lui redonner confiance dans le processus de consultation... Les technologies de l'information et de la communication (TIC) me semblent toutes désignées pour aider à atteindre ces objectifs.

Avec ces technologies, en effet, il devient facile de s'exprimer : un simple « clic » permet de voter, parfois sans même à avoir à quitter son domicile. Elles permettent, en outre, que les participants puissent se compter facilement et puissent, ainsi, évaluer le niveau de partage de leurs choix. Des dispositifs adaptés peuvent permettre aux participants de voir, en temps réel, évoluer les résultats de la consultation. Cette façon de procéder pourrait, d'ailleurs, contribuer à créer une émulation, favorable à la participation au processus, au sein de la population. Le caractère moderne, direct et instantané de ce type de consultation électronique aurait, en outre, l'effet de rendre l'opération plus attractive tout en rassurant les citoyens quand au sérieux de la consultation... Il faudrait aussi s'assurer que le contrôle du processus électronique demeure bien, lui aussi, démocratique et soit aux mains des représentants choisis par les citoyens. Internet serait ainsi définitivement confirmé dans son rôle au profit d'une démocratie moderne.

Deux exemples récents pris au Québec :

- En décembre 2010, une pétition électronique exigeant du gouvernement libéral la mise en place d'une commission d'enquête publique sur l'industrie de la construction, a reçue plus de 18000 signatures en 18 jours !
- En fin d'année 2010, une pétition placée sur le site Web de l'Assemblée nationale, demandant la démission du Premier ministre du Gouvernement du Québec, collecte plus de 240 000 signatures par voie électronique en un temps record...

Plus encore que la rapidité de l'expression des citoyens québécois, ce qui me semble remarquable, dans ce dernier cas notamment, c'est que ces faits se sont produits alors même que l'apathie semblait gagner l'ensemble des citoyens et que aucune manifestation publique ne venait exprimer le mécontentement profond des québécois face à la corruption et à l'inaction du Gouvernement...

Dès lors, on peut se demander pourquoi ne généralise t-on pas ce mode de consultation des citoyens qui semble bien adapté au mode de vie actuel ? Existerait-il une sorte de « conspiration du silence » qui viserait à empêcher l'extension de ce mode de consultation des citoyens ?

On pourra toujours objecter que ce mode d'expression démocratique ne saurait convenir aux pays en développement, compte tenu de l'état embryonnaire du réseau Internet dans ces pays. Cet argument est recevable, mais ne me paraît pas de nature à condamner l'évolution des choses. En effet, il suffit de penser, par exemple, à la rapidité qui a prévalue dans la mise en place du téléphone portable dans ces pays. D'emblée, ce mode de communication a dépassé, en nombre d'appareils utilisés, celui des postes fixes dont l'emploi avait pourtant précédé celui des téléphones portables dans la plupart des pays riches. Il serait assez facile de rendre le réseau Internet accessible à la majorité des populations si la volonté politique s'en faisait le relais. En rendant plus attractif et plus crédible le processus de consultation, les citoyens de ces pays pourraient, eux aussi, être rassurés et, par voie de conséquence, moins contester, a posteriori, les résultats de ces opérations... Il y aurait là également un moyen de diminuer les éventuelles pressions exercées sur les participants au moment où ils se rendent dans les bureaux pour exercer leur droit de vote. Bien entendu, il ne faudrait pas penser que la démocratie pourrait s'installer dans ces pays simplement en faisant appel à ce type d'interrogation des citoyens. Cette façon de faire ne serait qu'un appui à la démocratisation de ces sociétés, une voie qui serait à même de faciliter celle-ci à la condition que la volonté politique se fasse l'écho de ce désir.

Pour peu que l'on s'en donne les moyens, le vote électronique rassemble plusieurs avantages : modernité, facilité d'emploi, rapidité d'exploitation, fiabilité des résultats, contrôle accéléré des résultats... De plus, les réseaux sociaux électroniques (Facebook, Twitter,...) permettent aujourd'hui, une concertation efficace entre les citoyens de nature à faciliter le contrôle indirect de l'expression démocratique. En effet, si un résultat annoncé est en contradiction avec la réalité des choix des citoyens, ce hiatus apparaitra immédiatement au travers des réseaux sociaux. Peut être qu'alors, le triste spectacle de consultations électorales délaissées, contestées, critiquées deviendra plus rare...

lundi 29 novembre 2010

A propos du livre « Haïti- Kenbe la! »

Le dernier livre de Rodney Saint-Eloi, intitulé "Haïti kimbe la!" (Editions Michel Lafon, Neuilly-sur-Seine (France), 2010), se veut une relation de l'expérience vécue par l'auteur lors du séisme qui a frappé Haïti le 12 janvier 2010. Effectivement, on y découvre comment il a pu échapper à la mort grâce à ce que l'on pourrait qualifier de hasard ou de chance. Comment son ami, Dany Laferrière, en l'invitant a diner, a contribué à lui sauver la vie.... On peut aussi, par cette lecture, ressentir toute la souffrance des Haïtiens meurtris dans leur chair par ce drame qui n'a épargné personne mais qui a, une fois de plus, décimé surtout les plus pauvres d'entre eux.... Le livre nous fait vivre, presque minute par minute, l'existence de la population de Port-au-Prince dans sa lutte quotidienne pour sa survie. L'auteur évoque aussi, mais a mon avis, sans vraiment apporter d'éléments nouveaux, les causes des malheurs actuels de la République de Haïti. Son histoire mouvementée et par bien des côtés, dramatique. La colonisation française puis « états-uniène » est rappelée, ainsi que l'incapacité des dirigeants haïtiens à assurer le développement du pays...

Ce qui me touche plus particulièrement dans cet ouvrage est le style de l'auteur, souvent, poétique et même lyrique. Un lyrisme que l'on retrouve, d'ailleurs, dans la belle préface de l'écrivain algérien, Yasmina Khadra chantant la fraternité des écrivains issus des peuples «damnés de la Terre». L'écriture est fluide et le texte se lit de façon continue sans accroc, un peu comme une longue prière adressée aux dieux protecteurs.... La narration est d'une structure simple et, personnellement, j'ai lu cet ouvrage avec plaisir et en très peu de temps. Un des intérêts majeur du livre est, à mon avis, lié à tout ce que l'on apprend sur la vie de l'auteur.

J'ai eu l'occasion de rencontrer Rodney à plusieurs reprises depuis que je réside à Montréal et, bien que nos origines créoles, aient contribuées à nous rapprocher, je ne le connaissais que superficiellement. Ce livre m'a permis de mieux cerner son histoire personnelle, celle de sa famille proche, ses amitiés souvent fortes et passionnelles... J'ai ressenti au travers de ce texte toute la créolité du personnage, son attachement profond à son île et son déchirement d'exilé, sentiment bien connu de nombreux caribéens dont la vie se partage entre leur île et leur pays d'accueil. Comme, il l'écrit lui-même, il espère "que ce livre fera taire en lui les fureurs du goudou-goudou" (terme imagé, utilisé par les Haïtiens pour désigner le séisme).

A l'heure où Haïti vote, afin d'élire un nouveau Président et une assemblée nationale renouvelée, cet ouvrage prend tout son sens en faisant percevoir au lecteur l'immensité de la tâche qui reste à accomplir, alors que pratiquement plus rien ne fonctionne normalement, que plus de 80% des cadres sont à l'extérieur, que les familles sont presque toutes dans le deuil, que l'épidémie de choléra frappe, que la classe politique est paralysée, que la corruption règne et que la misère frappe une très grande partie du peuple...

Cependant, Rodney Saint-Eloi n'oublie pas que la culture est un atout maître pour le peuple haïtien et il s'appuie, pour cela, sur l'exemplarité de l'écrivain Franketienne qui : "écrit. Il monte des pièces de théâtre qu'il joue. Il chante. Il peint. Il attend le prix Nobel. Dans cette effervescence, il reconstruit sa maison. Un sacré rappel à l'ordre...."

Voilà un ouvrage d'une actualité brulante, d'une lecture facile et agréable que devrait lire tous ceux qui s'intéressent de près ou de loin à Haïti.

samedi 27 novembre 2010

A propos du "Manifeste d'un sur-taxé"

Je viens de terminer la lecture du pamphlet intitulé "Manifeste d'un surtaxé", rédigé par Robert Deschamps et publié aux Editions « Carte blanche » (Montréal, 2010). Même si cet essai contient certaines affirmations qui semblent véridiques, on ne peut qu'être frappé par son caractère outrancier et extrémiste.
L'auteur, en effet, rejette en bloc tout ce qui constitue le Québec contemporain : ses gouvernements et la politique menée, tant par le Parti québécois que par le Parti Libéral; sa classe politique, accusée de n'avoir "aucun intérêt à modifier ses pratiques d'extorsion fiscale, ses promesses de gratuité irréelle et ses programmes de redistribution d'une richesse qu'elle n'a pas produite"; son système éducatif, "qui n'a pas la moindre chance de rendre les québécois avisés et performants dans le domaine économique"; son système de santé, "étatisé" ; "son système social qui cautionne la médiocrité, la fainéantise et l'hédonisme parasitaire" ; le peuple québécois, lui-même, est qualifié "de frivole et fanfaron qui ne voit dans l'économie qu'un énorme coffre au trésor à piller" ; le monde de la culture, devenu une "féodalité coûteuse..." .

Le style utilisé, agressif et prétentieux, ne fait que renforcer le malaise que l'on éprouve à lire ce texte. D'une façon plus générale, l'argumentaire de l'auteur est centré sur la lutte contre les "improductifs" qui sapent la société québécoise dans tous ses fondements. La solution préconisée est simple (et sans doute simpliste) : confier le pouvoir absolu aux entrepreneurs. Les pôles d'interventions suggérés par l'auteur tiennent en quatre points :
- "intensifier la valorisation des productifs";
- "intensifier le discours critique à l'endroit des improductifs";
- "concurrencer l'Etat sur tous les plans";
- "infléchir pédagogiquement la productivité".

Cet ouvrage est, en fait, une ode à l'individualisme et aux entreprises privées par opposition au service public. Une difficulté vient du fait que l'auteur mélange des faits réels indéniables avec des positions extrêmes difficilement crédibles. Un seul exemple : s'il est partiellement vrai, comme l'écrit l'auteur, que "les organisations qui produisent l'abondance matérielle sont mises sur pied par des individus particuliers, visionnaires, déterminés, audacieux, superbement organisés et efficaces, dont le nombre au sein d'une nation, demeure restreint et invariable,.." peut-on aller jusqu'à en déduire, comme le fait R. Deschamps que : "il existe, au sein de l'Humanité, une hiérarchie naturelle en vertu de laquelle la valeur d'un individu se trouve déterminée par l'absolue nécessité de sa présence dans le processus de la production des biens et services. Ainsi, en haut de l'échelle, il y a les fondateurs d'entreprises... Au second rang, viennent les chercheurs et les inventeurs... En troisième position, se trouvent les professeurs... En quatrième place, on retrouve les gestionnaire... Cinquièmement, entrent en jeu les praticiens professionnels... Enfin, au dernier échelon, s'alignent les ouvriers de toute nature...." ?

Il est certain que l'appel au privé ne doit pas être négligé dans une société moderne. C'est, en effet, une façon de décupler les ressources disponibles au service d'un projet. Cependant, il ne faut pas perdre de vue que, tant le privé que le service public, sont en synergie permanente et que c'est souvent la compétition entre ces deux types de service qui fait progresser la situation. Il s'agit, en réalité, de deux approches qui sont complémentaires et nécessaires. D'ailleurs, on observe, souvent, que les progrès de l'un entrainent l'évolution positive de l'autre... Il ne faut pas non plus croire que l'absence totale de services publics puisse être considérée comme une solution fiable aux problèmes sociaux. L'Etat, au travers des services publics et de son administration, vient apporter une régulation dans le fonctionnement de la société. Cette action se réalise, le plus souvent, au profit des éléments les plus faibles de la société qui risqueraient, autrement, d'être laminés et abandonnés. L'absence d'intervention de l'Etat deviendrait contre-productive, car la création de pauvreté va souvent de pair avec l'apparition de délinquances de toutes sortes... Les mieux nantis profitent, eux aussi, de l'intervention étatique en leur permettant, par exemple, de mieux protéger leur patrimoine ou leurs acquis.

Une société, une nation, quelle qu'elle soit, a besoin de grands projets pour avancer. Souvenons nous du président des Etats-unis d'Amérique, JF Kennedy, qui, dans les années 1960, proposa à son pays le programme dit "Nouvelle frontière" avec pour objectifs la détente avec l'URSS, l'envoi d'un homme sur la lune, l'égalité des noirs et des blancs, la relance de l'économie, la lutte contre la pègre et l'arrêt de l'expansion communiste dans le monde. Il en fût de même en France, avec le général De Gaulle qui, à partir de sa prise de fonction comme président de la République française en 1959, engagea son pays dans un difficile programme de revitalisation basé sur la création du nouveau franc, sur le refus de la domination des Etats-unis d'Amérique et de l'URSS, sur l'indépendance de la France et de sa force de frappe nucléaire, sur la création d'un programme spatial, sur la mise en place de la Communauté économique européenne... Au Québec aussi, les années 60 voient le début de la "Révolution tranquille" caractérisée par une réorientation de l'Etat québécois qui adopte les principes de l'Etat-providence, la séparation de l'église et de l'Etat et la construction d'une nouvelle identité québécoise différente de la référence au canadien-français.

Aujourd'hui, nombre de sociétés, notamment en occident, semblent bloquées, comme parvenues à un état de développement qu'elles ont du mal à dépasser, à modifier. Pourtant, la plupart des données environnementales et socio-économiques poussent aux changements. La fin programmée des ressources énergétiques traditionnelles (pétrole, uranium,...), le réchauffement climatique, la pollution atmosphérique, terrestre et maritime, la croissance forte de la population mondiale et la crainte du manque de ressources alimentaires, le creusement généralisé des inégalités entre riches et pauvres, la généralisation de l'abstention dans les processus électoraux, les crises financières à répétition, la perte de confiance dans la classe politique, ... tout cela constitue une incitation forte au changement, à la réorientation des politiques.

Il devient urgent de proposer de nouveaux grands projets aux citoyens, de « nouvelles frontières » à conquérir, de nouveau rêves... Dans cette perspective, il m'apparaît que la proposition du "Manifeste" de Robert Deschamps de faire du Québec une "terre de performance véritable", à partir de la glorification de la productivité et de l'individualisme, n'est pas à la hauteur du défi. La création, suggérée par l'auteur, d'une catégorisation naturelle des individus en fonction de leur propension à être productif ne peut faire rêver personne et pourrait tout au plus donner des frissons de peur à certains... Le rêve, pour le Québec, de constituer un jour un pays semble actuellement écorné mais il pourrait cependant, renaître s'il était proposé de façon nouvelle, de façon plus dynamique qu'à partir du sempiternel référendum préalable... La langue française, qui semble en perdition aujourd'hui, serait susceptible d'être porteuse d'un grand projet qui dépasserait les frontières du Québec, une alliance des francophones d'Amérique, des Amériques, qui inclurait l'Amérique du nord, l'Amérique centrale, l'Amérique du sud, la Caraïbe et, bien entendu, les canadiens francophones hors du Québec. Travailler en français, se cultiver en français, se distraire en français pourrait être motivant au sein de cette alliance. Mieux encore, montrer au monde que l'égalité des langues peut être vécue de façon sereine et réelle en prônant un plurilinguisme actif et concret, c'est à dire reposant sur une politique linguistique adéquate au sein du système éducatif, serait aussi un des objectifs de ce grand projet dont le Québec pourrait devenir le leader. Il serait, d'ailleurs, possible de profiter du côté multiculturel affirmé de la métropole montréalaise pour atteindre cet objectif. Se donner des perspectives de réduction des inégalités entre le Nord et le Sud, entre les riches et les pauvres; redonner du sens aux valeurs humanistes, bâtir une société québécoise moins matérialiste, plus solidaire, plus harmonieuse; contribuer à l'utilisation de nouvelles sources d'énergie moins polluantes, plus durables... sont des perspectives qui peuvent capter les énergies et les rêves de la jeunesse...

dimanche 21 novembre 2010

L'incohérence en politique

Dans la plupart des « démocraties occidentales », les responsables politiques paraissent s'être placés eux-mêmes dans une impasse quant à leur crédibilité auprès de l'électorat. Celle-ci, et c'est bien connu aujourd'hui, se trouve au plus bas dans la plupart des pays occidentaux. Les causes de cette perte de confiance des électeurs sont multiples : la corruption et les « affaires » bien entendu, mais aussi, une certaine impuissance à améliorer la situation, à régler les problèmes des citoyens. Enfin, la déception de l'électorat face à des promesses toujours présentes mais rarement tenues... Généralement, la cause première de cette situation se trouve dans les positions incohérentes, presque masochistes, des décideurs politiques qui, après s'être privés des moyens d'agir ou même après avoir détruit ce qui fonctionnait, tentent de rétablir les choses...Voici trois exemples de cet état de fait :

Le chômage des jeunes en France : les gouvernements se succèdent, passant de la gauche à la droite ou réciproquement, les bonne intentions des responsables politiques s'affichent régulièrement et pourtant, malgré un effort financier le plus important des pays de l'OCDE, le taux de chômage des jeunes en France reste le double de la moyenne nationale, 20,7% pour l'année 2000, contre 11,8% pour l'ensemble des pays de l'OCDE. En février 2010, soit 10 ans plus tard, ce taux en France est encore de 25%... Ce phénomène est loin d'être limité à la France, il touche beaucoup de pays. "Le chômage des jeunes dans le monde a atteint le plus haut niveau jamais enregistré et devrait encore augmenter en 2010", a précisé le BIT dans un rapport sur l'emploi des jeunes. Le taux de chômeurs est passé de 11,9 % en 2007 à 13 % l'année dernière. Il devrait progresser légèrement à 13,1 % en 2010 avant de retomber à 12,7 % l'année suivante, selon les projections de l'organisation.
Les raisons de cet échec sont multiples même si on sait, aujourd'hui, que le chômage des jeunes amplifie les fluctuations de la conjoncture économique. Toutes les études le montrent, le diplôme est encore la meilleure protection contre le chômage, mais les phases de raréfaction de l'embauche conduisent à une déqualification des emplois, les plus diplômés acceptant des postes occupés, dans les phases de haute conjoncture, par des diplômés de niveaux intermédiaires ; en fin de chaîne ce sont les moins qualifiés qui pâtissent le plus de la basse conjoncture.
Si l'on considère la question de la formation des jeunes et de leurs qualifications, qui interviennent aussi dans leur avenir professionnel, on retrouve un schéma voisin de celui décrit ci-dessus. En effet, les responsables politiques, pourtant conscients de l'importance de la formation en matière d'emploi, n'ont pas réussi au cours des années, à faire croître le taux de diplômés d'une classe d'âge donnée. En 1970, la France par exemple, avait un pourcentage de diplômés de l'enseignement supérieur inférieur à la moyenne de l'OCDE. Aujourd'hui, c'est toujours le cas pour les diplômes de l'enseignement supérieur long : 24% contre 27% pour l'OCDE et 33% pour l'Europe. Une particularité de la France est le faible taux de scolarisation des 20-29 ans et surtout le fait que ce taux n'ait pas augmenté depuis 1995...
Or, si l'embauche, toutes catégories de la population et tous pays confondus, diminue c'est en grande partie à cause des délocalisation des emplois que permet la mondialisation libérale, par ailleurs tant vantée et soutenue par les responsables politiques. Les pays capitalistes développés et leur instrument, l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), poussent au démantèlement général des barrières douanières. Celui-ci est déjà très avancé pour l’industrie. L’agriculture est encore un sujet de conflits (pour des raisons de compromis sociaux, l’Europe et les USA ont chacun des systèmes de protection et de subvention de leur agriculture). Les services constituent un chantier hétérogène et conflictuel (nouveau champ de profit, tentatives de remise en cause des services publics). La mondialisation de la finance est la modalité la plus avancée de la mondialisation, même si ce n’est pas la première fois dans l’histoire qu’on est en présence d’un rôle important des marchés financiers (fin XIX°). La plupart des pays du monde ont aujourd'hui libéré les entrées et sorties de capitaux, dont les mouvements internationaux augmentent et s’accélèrent. Tous ces développements sont organisés, soutenus et valorisés par les politiciens au pouvoir dans la plupart des démocraties occidentales.
Dès lors, comment croire le Président de la République française, Nicolas Sarkozy, lorsqu'il a affirmé, mardi 16 novembre 2010, à la télévision française, que "le chômage reculera l'année prochaine" et que l'engagement du gouvernement sera "total sur ce front-là", notamment en faveur des licenciés économiques et des jeunes. Que l'on soit libéral, néolibéral ou ultra-libéral ne change rien au fait que les gouvernements résistent peu à l'extension tous azimuts de la mondialisation et participent même à sa mise en place... En conséquence de quoi, il est difficile de les croire lorsqu'ils affirment à l'intérieur de leurs frontières, vouloir faire diminuer le chômage des jeunes tout en négociant à l'extérieur des frontières nationales, l'extension de la mondialisation libérale... Ce faisant, ils se privent eux-mêmes des moyens nécessaires à la résolution des difficultés vécues par leurs citoyens.

Mais les exemples de l'incohérence et de l'impuissance des responsables politiques ne sont pas restreints à la seule France. Le cas suivant est pris au Canada-Québec en donne une autre illustration.

Le système de santé au Québec : il est un fait avéré que le système de santé au Québec présente, depuis fort longtemps, des difficultés : les dépenses colossales qu’il nécessite sont accompagnées de services limités et de temps d’attente trop longs. Les débats pour trouver des sources de financement se multiplient, alors que beaucoup pensent qu’il serait insensé de majorer le fardeau fiscal des Québécois, déjà un des plus élevés en Amérique du Nord. Certaines solutions se dessinent, mais restent controversées : l’implantation de frais modérateurs et l’ouverture vers le privé. La question des temps d'attente, dans les services d'urgences notamment, semble exemplaire : ceux-ci ne font que croître régulièrement, alors même que les responsables politiques, lors de chaque élection, font la promesse de faire diminuer ces temps... Le temps d'attente médian, au Québec, entre la référence par un omnipraticien et le début du traitement est passé de 7,3 semaines en 1993 à 16,5 semaines en 2009, ce qui représente une augmentation d'un peu plus de 2 mois. Ce temps d'attente est plus élevé que la moyenne canadienne qui était de 9,3 semaines en 1993 et de 16,2 semaines en 2007. Les programmes électoraux des différents partis, lors de chaque élection pratiquement, mettent la question de la santé à l'ordre du jour. Ainsi, en 2003, la santé constituait une des priorités du programme du Parti libéral du Québec qui a remporté les élections. Aujourd'hui néanmoins la question reste entière...
Aux dires de nombreux québécois, leur système de santé fonctionnait assez bien jusqu'en janvier 1996, date de l'arrivée de Lucien Bouchard (Parti Québécois) au poste de Premier Ministre du Gouvernement du Québec. Le budget provincial voté en 1999 fait état d'un déficit budgétaire nul obtenu par des coupes importantes dans les services publics et dans la santé notamment. Le déficit du Québec, dans les années 1996 et 1997, avait été, en outre, aggravé par les coupures de 2,3 milliards de dollars du gouvernement fédéral dans les soins de santé. Afin d'obtenir l'annulation du déficit budgétaire, les responsables politiques québécois ont forcé le départ de 33000 personnes travaillant dans le système de santé : 1500 médecins, 4000 infirmières, 1800 auxiliaires ont pris volontairement et prématurément leur retraite tous en même temps. Dès lors, après avoir terrassé le système de santé, les politiciens se sont attelés à la tâche de le remettre en état!
Pire encore, le Parti Québécois qui est resté au pouvoir pendant une longue période (entre 1976 et 1985, puis entre 1994 et 2003) a contribué, par ses arguments, à faire croire aux citoyens québécois que l'appel au privé en matière de santé était une quasi hérésie. Si bien, qu'aujourd'hui encore, nombre de québécois sont réticents à faire appel au privé dans ce domaine, alors que chacun pourrait facilement comprendre que , dans un contexte de pénurie, ce n'est pas tant le privé qui est condamnable mais plutôt la façon dont le Gouvernement l'insèrerait au sein du système de santé. Le système de santé en France est souvent cité comme une référence mondiale et pourtant il fait appel au privé...
Encore une fois, cet exemple montre à la fois l'incohérence et le peu de vision à long terme des responsables politiques qui semblent, en outre, ignorer le fait que construire est souvent plus long et plus difficile que détruire...

Le cas de l'Union européenne : on constate, au cours de la crise actuelle particulièrement, combien la gouvernance de l'Union européenne est difficile. A une période où il serait nécessaire de faire preuve d'unité et de cohésion, les chefs d'Etats européens ne cessent de se diviser, de s'opposer, rendant chaque jour la situation de l'Union plus délicate et la fragilisant toujours plus... Lorsque les pères fondateurs de l'Europe ont entamés la « grande marche » vers la création de l'unité européenne, ils devaient, sans aucun doute, avoir en tête la projection future vers une gouvernance supra nationale de cet ensemble de nations. Or, leurs successeurs, même s'ils ont acceptés, apparemment sans réticence, de chevaucher le cheval de l'union, n'ont cessés de faire ressurgir les vieux démons nationaux à la moindre difficulté. Ils n'acceptent qu'avec beaucoup de précautions de perdre un pouce de leur pouvoir national au profit de l'Union. Lors de chaque élection nationale au sein des pays de l'Union européenne, il est remarquable de constater que les programmes des candidats ou des partis politiques sont, avant tout, des programmes nationaux et, que pratiquement rien n'est dit sur l'avenir de l'Union elle même. Quand verra t-on une élection nationale en Europe mettre en avant les questions proprement européennes ? Les difficultés actuelles de l'Europe dans les domaines monétaire, social ou économique sont en grande partie le résultat de ces divisions ou de cette indifférence envers les problèmes supra nationaux... Peut-on vouloir créer une nouvelle entité rassemblant vingt sept pays tout en maintenant la gouvernance au niveau de chaque nation ? Est-il raisonnable de s'engager dans le processus de la construction européenne tout en oeuvrant, en chaque occasion, à la construction de sa seule et propre nation ? Pourtant, il faut savoir que l'échec de l'Union européenne serait, à coup sûr, l'échec de chacune des nations constitutives. Le coup à payer, dans une telle éventualité serait considérable et les responsables politiques d'un tel désastre ne s'en relèveraient pas. Les citoyens européens ne doivent perdre de vue ce point de façon à pouvoir constamment le rappeler à leurs dirigeants....

Il serait facile de multiplier les exemples allant dans le même sens. Après s'être enlevés les moyens d'agir, dans une situation difficile donnée, nos responsables sont souvent portés à croire qu'il suffit de faire des promesses inconsidérées ou de la surenchère gratuite pour pouvoir séduire leur électorat et ainsi faire taire ses réticences. C'est, par exemple le cas du président français, Nicolas Sarkozy, qui a basé sa première campagne présidentielle sur la notion de « rupture », une nouvelle façon sans doute de qualifier la « révolution tranquille » chère aux Québécois. Trois ans après son accession au pouvoir, les français sont encore à la recherche de cette fameuse rupture. En tous cas, s'il y en a une elle est loin d'avoir améliorée la situation des citoyens français qui, aujourd'hui sont placés dans une situation socio- économique plus détériorée qu'avant l'élection. Pire encore, en prévision de la prochaine élection présidentielle de 2012, la « seconde rupture » semble déjà se profiler dans le programme électoral du candidat Sarkozy... Y croire serait, cette fois, faire preuve de masochisme de la part des citoyens français... L'incohérence en politique est source d'inefficacité, d'indécision et ouvre la porte à la perte de confiance des citoyens, au développement de l'individualisme et même à la corruption.
En conclusion, il ne faut pas oublié que, dans les sociétés démocratiques, les responsables politiques sont, généralement, les représentants, souvent élus, des citoyens. En conséquence, il apparaît utile que les citoyens, eux aussi, s'interrogent sur la cohérence de leurs choix politiques...

jeudi 11 novembre 2010

Le désespoir des français

Plusieurs commentateurs (voir notamment le journal « Le Monde » du 6 novembre 2010) insistent ces derniers temps sur la perte de confiance qui gagne les français. Le mouvement social contre la réforme des retraites a servi de révélateur à cette crise qui conduit les citoyens français à voir l'avenir teinté de sombre... Les causes de cette situation ont été analysées amplement et, sans qu'il soit besoin d'insister, on peut en rappeler quelques unes ici : sentiment de régression face aux attaques du gouvernement contre les acquis sociaux, sentiment d'impuissance devant la perte de prestige de la France dans le monde, devant les conséquences de la mondialisation, difficulté d'emploi pour les jeunes mais aussi pour les plus âgés, perte de pouvoir d'achat par suite du plan de rigueur gouvernemental, défiance envers la classe politique, remise en cause du modèle français singulièrement sur les plans de la santé et de l'éducation, accroissement des inégalités entre les plus riches et les plus pauvres, impuissance relative face aux problèmes crées par l'émigration,... Cette liste est loin d'être exhaustive. Cependant, il serait pernicieux de s'arrêter à ces maux sans mettre en exergue les points forts et les réussites de la France dans bien des domaines. Lorsque l'on voyage un peu, il apparaît rapidement que la France reste encore une référence pour la qualité de vie qu'on peut y trouver, pour le niveau de protection sociale qui est offerte aux citoyens, et même pour la capacité des citoyens français à se mobiliser pour défendre des causes ressortissant de l'intérêt général. Pour autant, les aspects positifs ne semblent pas suffire à remonter le moral des citoyens français.

Il me semble que deux points mériteraient d'être un peu plus étudiés, alors qu'ils ne sont généralement pas ou peu mentionnés dans la liste des causes de mécontentement : il s'agit de la montée de l'individualisme d'une part et, de la remise en cause de la langue française d'autre part.

L'individualisme est devenu pour certains, et pour nombre de jeunes particulièrement, la nouvelle utopie sociale. Selon cette conception, chacun se doit de mener sa vie comme il l'entend et l'Etat-providence n'a plus à intervenir dans la vie de chacun. Ainsi, par exemple, il n'est plus besoin de système de retraite, chaque personne étant responsable de la préparer pendant sa vie active. Ce modèle, directement inspiré des théoriciens du libéralisme, s'est illustré de façon spectaculaire lors des dernières élections à mi-parcours aux Etats-unis d'Amérique, au travers des thèses défendues par le « Tea Party ». Selon les tenants de cette approche, les gouvernements libéraux doivent mettre en avant l'initiative individuelle, notamment en matière de protection sociale, ce qui a pour effet de casser le lien social entre les individus et de faire diminuer la résistance des citoyens basée sur leur solidarité. On sait, en effet, qu'aucun changement de société important ne peut s'obtenir en l'absence d'unité, de solidarité, ou au moins d'un consensus important au sein de la société....
Un exemple récent pris au Québec montre comment la perte de la notion d'intérêt général au profit d'intérêts catégoriels et donc, d'un certain degré d'individualisme peut être néfaste : un professeur d'université proposait que les étudiants acceptent l'augmentation des droits de scolarité proposée par le gouvernement au prétexte qu'ils vont, plus tard, devenir les individus les plus riches de la société..... Ce type de raisonnement ne peut que casser la solidarité qui existe naturellement entre les étudiants et les travailleurs les moins riches. En mettant l'accent sur la différentiation future entre les étudiants d'aujourd'hui et les cadres qu'ils seront demain on place déjà un coin entre ces deux catégories de citoyens et on tend a casser la solidarité possible dans le moment présent.... Le modèle des Etats-unis d'Amérique étant très populaire dans la jeunesse, il n'est pas étonnant de voir cette conception individualiste progresser régulièrement chez les jeunes français. Cela est d'autant plus compréhensible que le modèle français, lui, a fait la preuve de son inadaptation au monde contemporain au regard du taux élevé de chômage qui frappe la jeunesse dans ce pays. Dans ce contexte, il est de plus en plus fréquent de voir des jeunes français quitter la France pour s'expatrier en Amérique du nord en imaginant que leur avenir y sera plus facile. Près de 7000 Français étudient dans les universités québécoises alors qu’environ un millier de Québécois partent étudier en France chaque année. On a même observé une inversion du flux d'échange des étudiants entre la France et le Québec. Il y a quelques années, c'étaient les québécois qui étaient les plus nombreux à partir vers la France.
Il ne faut pas se tromper, les nombreuses manifestations de rue, plus ou moins spontanées, qui ont lieu régulièrement en France, le succès des réseaux sociaux virtuels du type Tweeter ou Facebook et, plus généralement de l'Internet... tout cela ne peut combler le déficit croissant de lien social qui affecte l'Hexagone. Ce déficit trouve ses causes dans plusieurs origines : la désintégration de la famille, le délaissement religieux, la désyndicalisation, la défiance envers les partis politiques et les politiciens,... Le "salut" pour beaucoup de français ne semble plus n'être qu'à la portée de choix individuels, de décisions personnelles. Le corollaire de cette perception étant un fort sentiment de solitude et d'impuissance qui peut parfois conduire jusqu'à la dépression comme on a pu le constater dans nombre de faits divers récents manifestant la difficulté de la vie en entreprise...
Combattre cette tendance ne pourra se faire que par la remise en avant de grandes causes d'intérêt général. Nombre de défis sont devant les français : le sauvetage des systèmes d'éducation, de santé et plus généralement de protection sociale; le retour aux valeurs de générosité et de tolérance envers l'étranger, la lutte contre l'augmentation des inégalités, contre l'appauvrissement de la majorité de la population, le rétablissement de l'image de la France dans le monde et la fin de l'alignement sur les modèles libéraux qui ont largement fait la preuve de leur échec. Il faut que les français acceptent d'être eux-mêmes en proposant au monde des modèles originaux en matière de développement économique, culturel, social... Ils peuvent le faire au sein de l'ensemble européen en travaillant à orienter l'Union vers des objectifs plus conformes à leurs souhaits. Cela ne sera possible qu'en s'appuyant sur une restructuration de la population en terme d'union et de solidarité. L'éparpillement des forces de changement, l'action individuelle,... ne pourront jamais remplacer la puissance de l'union, la force de la cohésion, pour faire aboutir les changements. Une fois terminée, les actions d'éclats dans les rues il faut encore être capable de conserver une certaine crédibilité, un pouvoir de négociation qui ne sont possibles que si l'on dispose d'organisations structurées et représentatives. Avec 8 %, la France enregistre le pourcentage de syndiqués dans sa population active le plus faible de l’OCDE. Les syndicats actuels ont perdus de leur crédibilité en s'éloignant des objectifs essentiels pour leurs mandants. Ce n'est qu'en menant des actions combatives et victorieuses sur les thèmes qui constituent les priorités de leurs membres que les syndicats pourront regagner de la popularité. Chaque bataille perdue est une incitation pour les syndiqués à quitter l'organisation.

Le second point qui me paraît justifier une partie du désespoir des français est relatif au traitement qui est infligé à leur langue : le français. Le problème est connu, cette langue, comme bien d'autres, se trouve affaiblie devant la montée de l'anglo-américain. Chacun peut, quotidiennement, constater son infection par des mots anglais, dans les médias et dans la publicité notamment. Les entreprises imposent de plus en plus souvent la maîtrise et l'emploi de l'anglais à leurs employés au mépris des réactions de ceux qui souhaitent continuer à travailler en français. L'université et la recherche ont vendu leur âme à l'anglais depuis déjà longtemps au point qu'il est devenu quasiment impossible de publier un résultat de recherche en français voire de communiquer dans cette langue. Le cinéma français lui aussi est aliéné au point de ne plus produire que des bandes sonores anglophones. Les chanteurs francophones se mettent eux aussi à la mode en chantant dans la langue de Shakespeare de plus en plus fréquemment...Les responsables politiques eux-mêmes se permettent d'utiliser un niveau de langage peu respectable des normes. On est en droit de s'inquiéter quand le langage du président de la République(« Casse-toi pauv'con ! ») devient un symptôme du « parler vrai », accessible et populaire, qui déferle dans toute la classe politique. A l'ONU, où le français est pourtant une langue de travail, les responsables francophones préfèrent s'exprimer dans un anglais imparfait, mais conforme à celui de l'élite mondialisée...Comme si la langue, et tout ce qu'elle représente - lien, identité, citoyenneté - était un héritage désuet et encombrant, juste bon pour la poussièreuse Académie française ou la méconnue Délégation à la langue française.

Mais le pire, le plus déprimant, reste l'inaction des élites face à cette situation. Inaction qui souvent frise la collaboration, la collusion. Est-il besoin de rappeler que la langue est une partie fondamentale de l'identité d'un individu ? Toucher à la langue peut donc créer un traumatisme profond chez les personnes. On a tous en mémoire des exemples soulignant ce caractère fondamental de la langue : au Québec, par exemple, la langue française, se transforma en une arme de combat et en symbole de libération d'une société qui n'acceptait plus son statut de minorité plus ou moins aliénée. Cette nouvelle vision de la langue, passée du stade défensif au stade offensif, a engendré «l'époque des lois linguistiques», c'est-à-dire la loi 63 (Loi pour promouvoir la langue française au Québec, 1969), la loi 22 (Loi sur la langue officielle, 1974) et la loi 101 (Charte de la langue française, 1977). Du statut de langue nationale des Canadiens français, le français accéda au statut de langue étatique, aboutissement ultime d'un long processus de libération nationale.

Un autre exemple est fourni par la politique d'arabisation en Algérie : Le passage de la langue française, langue du colonisateur, à la langue arabe ne s'est pas réalisé facilement et a donné lieu à de nombreuses dérives. Pourtant, dans ce cas, il s'agissait de rétablir une certaine justice au plan culturel en redonnant à la langue arabe une place plus importante, place qu'elle avait perdue au profit du français au cours de la période coloniale. Cette politique continue à faire problème de nos jours notamment dans le système scolaire. L'arabisation est, en effet devenue, le symbole d'une « école sinistrée » pour certains, alors que pour d'autres elle est emblématique de l'islam et de l'appartenance au monde arabe. Le pouvoir algérien a plus récemment été conduit à rénover le système éducatif en réintroduisant la langue française.

Les problèmes linguistiques en Belgique nous fournissent encore un exemple de radicalisation des positions basée, en partie, sur les différences de langues. La Belgique est passée d'un Etat unitaire en 1830, où les différences linguistiques ne jouaient qu'un rôle mineur, à la situation actuelle fondée sur un découpage en trois régions dotées d'une autonomie linguistique, culturelle et politique plus ou moins marquée. La domination historique des francophones et donc de la langue française, sur le néerlandais a conduit à la radicalisation progressive des positions flamandes et aujourd'hui, au risque d'éclatement du pays sur une base linguistique.

L'Afrique donne aussi à voir de multiples cas où le mauvais traitement linguistique a pu conduire à des affrontements violents entre groupes ethniques...

On pourrait multiplier les exemples soulignant combien la question linguistique peut être problématique pour les sociétés humaines, mais ce qu'il faut retenir ici me semble être le fait que toucher à la langue, la maltraiter, peut créer un profond désarroi chez les peuples concernés. Les citoyens français, sans tous en être conscients, me paraissent affectés par cette évolution qui vise à faire passer leur langue à un rang inférieur...

Les responsables politiques, les décideurs de toutes catégories devraient porter attention à ces questions aussi rapidement que possible, faute de quoi, ils risquent d'être surpris par le réveil de la population française qui affronte un ensemble de difficultés assez considérable en ce moment...

vendredi 5 novembre 2010

Contribution au débat public-privé en matière de santé au Québec

La question de la place du privé dans le système de santé québécois revient régulièrement à la une de l'actualité. La position la plus fréquemment entendue consiste à dire que, pour sauvegarder le système de santé au Québec, il faut éviter de donner une part de ce "marché" au privé (l'expression "médecine à deux vitesses" est souvent citée pour qualifier la participation du privé). Tout se passe comme si l'attachement des québécois à leur système de santé public interdisait de faire appel, peu ou prou, à la collaboration du privé. Il est pourtant inutile d'insister sur les difficultés du système public qui peine à remplir ses missions malgré des investissements toujours plus importants.

Rappelons simplement qu'un des points principaux du programme du Parti libéral du Québec, lors des élections de 2003, consistait précisément à diminuer les temps d'attente dans les services d'urgences des hopitaux. Il est clair, qu'aujourd'hui encore, cette question n'a toujours pas reçue de solution satisfaisante.

Sur un autre plan, les québécois se rendent compte de plus en plus que leur système de santé n'est pas à leur service mais plutôt que ce sont eux qui sont au service du système. Une simple illustration : généralement un rendez-vous avec son médecin de famille (lorsque l'on a la chance d'en avoir un) est fixé par le médecin et non par le patient. Si bien que, si vous n'êtes pas disponible le jour fixé, votre rendez-vous à toutes les chances d'être reporté pour un délai assez lointain...

Dans ce contexte, il me semble que l'appel à toutes les ressources disponibles devrait être encouragé. La médecine privée existe au Québec et au lieu d'être systématiquement condamnée, elle devrait être mise au service du public afin de collaborer à la résolution des difficultés du système de santé. Cependant, l'intégration du privé dans l'ensemble du service public de santé ne doit pas se faire sans précaution. Elle doit, notamment, sauvegarder les intérêts du public et, donc, ne pas entrainer de coûts supplémentaires pour les patients. Cela est possible si le Gouvernement québécois s'en donne les moyens en réglementant la question des coûts à supporter par les patients de façon à ce que le patient puisse librement choisir son système, public ou privé, avec des conditions de prise en charge qui soient identiques ou voisines. L'objectif ici n'est pas de mettre en place "un système à deux vitesses" mais plutôt un système de santé unique à deux composantes, l'une publique et l'autre privée. En un mot, un "système à une seule vitesse" qui soit plus efficace que l'actuel. Bien entendu, il faudra faire des choix budgétaires afin de mettre en place un tel système. Ces choix ne pourront se faire qu'avec l'accord de l'électorat.

Un autre avantage de cette façon de faire serait la mise en concurrence plus loyale des deux systèmes avec, pour conséquence, l'amélioration des performances d'accueil et de soins pour l'ensemble du système de santé.

jeudi 4 novembre 2010

La victoire annoncée du Président Obama

On peut désormais parier, avec de bonnes chances de succès, sur la victoire du président Obama aux prochaines élections presidentielles de 2012 aux Etats unis d'Amerique. Cette opinion peut paraître surprenante, alors même que les récentes élections a mi-parcours viennent de donner une victoire relative aux Républicains en reversant la majorité au Congrès. A mon avis, le président Obama est aujourd'hui dans une posture plus favorable pour aborder la prochaine échéance électorale. En effet, il possède désormais une justification facile à opposer aux éventuels futurs échecs de sa politique : sa responsabilité personnelle est attenuée par la présence de l'opposition majoritaire au Congrès. Il lui sera toujours possible d'argumenter en mettant l'accent sur les réticences de la majorité du Congrès par rapport à ses initiatives. Face au blocage du pays qui risque de résulter de cette nouvelle situation, le président Obama pourrait voir sa popularite se renforcer en passant de l'état de responsable principal à celui de "victime" du Congrès. C'est maintenant à lui de gérer finement cette nouvelle situation de façon à éviter d'endosser la responsabilité de la situation de blocage.... Il faut, en outre, se souvenir que l'électorat est souvent plus indulgent avec ses élus lorsque ceux-ci sont affectés d'un certain handicap qui leur a été plus ou moins imposé. On se souvient, par exemple, que la popularité de Lucien Bouchard au Québec a considérablement augmentée après que celui-ci ait du être amputé d'une jambe en 1994 à la suite d'une atteinte par une maladie rare. On se remémore également, qu'en France, la cohabitation politique entre le président socialiste F. Mitterand et le premier ministre de droite Jacques Chirac de 1986 à 1988 n'a pas empéché le président Mitterand d'être reélu en 1988. Il semble, généralement, plus facile à l'électorat de pardonner à un homme politique qui fait face à des difficultés reconnues qu'à celui qui parait n'en avoir aucune....

mercredi 3 novembre 2010

Complexité de la communication

La difficulté de communiquer est bien connue et ce, depuis longtemps. Elle est reliée à de nombreuses raisons, parmi lesquelles la description précise et objective de la réalité n'est pas la moindre. Communiquer fait, en effet, appel à plusieurs activités cérébrales : penser, observer, décrire, interpréter...

Les physiciens ont mis l'accent sur la question de l'observation et de la description, particulièrement dans le cadre de la physique quantique. Le "principe d'incertitude" fut énoncé en 1927 par Heisenberg. Ce principe ne porte pas sur l'ignorance subjective par l'expérimentateur de grandeurs, mais bien sur l'impossibilité de les déterminer, et même d'affirmer qu'une détermination plus précise de ces grandeurs existe. De manière simplifiée, ce principe d'indétermination énonce donc que — de façon assez contre-intuitive du point de vue de la mécanique classique — pour une particule massive donnée, on ne peut pas connaître simultanément sa position et sa vitesse. Une autre façon d'exprimer les choses a souvent été mise en avant par les théoriciens de la physique : l'observation de la réalité modifie cette réalité. En conséquence, il devient impossible de connaître précisément cette réalité. C'est, en fait, la mesure qui perturbe le système et le fait bifurquer d'un état quantique vers un autre état. Cet état ne préexiste pas à la mesure : c'est la mesure qui semble le faire advenir...
Ici, il est question du niveau atomique de la réalité et on pourrait se demander en quoi cela est en relation avec l'observation du monde au plan macroscopique ? Une réponse simple est que le monde étant constitué d'atomes, il est fort probable que les aspects quantiques de la physique doivent aussi se faire sentir au niveau macroscopique. En fait, cette relation entre les deux niveaux d'observation a été mise en évidence, dès 1935, par le physicien Erwin Shrödinger. L'expérience du chat de Schrödinger a justement été imaginée pour faire surgir l'indéterminisme microscopique dans le monde macroscopique de notre vie quotidienne. L'idée de Schrödinger consiste à placer un chat dans une boite fermée. Cette boite est pourvue d'un système destiné à tuer le chat (il s'agit évidemment d'une expérience de pensée.). Ce système est constitué d'un flacon de poison, d'une petite quantité de matière radioactive et d'un compteur Geiger. Lorsque la première désintégration d'un noyau radioactif se produit, le compteur Geiger réagit en déclenchant un mécanisme qui casse le flacon et libère le poison mortel. Ainsi, la désintégration d'un noyau radioactif, un processus microscopique, se traduit par la mort du chat, un événement macroscopique. La désintégration d'un noyau radioactif est un processus purement quantique qui se décrit donc en termes de probabilités. Il est impossible de prévoir quel noyau se transformera en premier ou bien quand la première désintégration se produira. La seule chose que nous puissions calculer est la probabilité qu'un certain nombre de noyaux se soient désintégrés après un temps donné. Nous pouvons en particulier choisir une substance radioactive adéquate de telle façon qu'après cinq minutes, il y ait 50 pour cent de chances qu'un noyau se soit désintégré et 50 pour cent de chances que rien ne se soit produit.
Fermons donc la boite et patientons pendant cinq minutes. Puisque la désintégration radioactive s'exprime en termes de probabilités, le sort du chat ne peut être décrit qu'en termes similaires. Après cinq minutes, il y a donc 50 pour cent de chances que le chat soit mort et 50 pour cent de chances qu'il soit vivant.
Dans l'interprétation traditionnelle de la mécanique quantique, le chat n'est alors ni mort, ni vivant. Il se trouve dans une superposition de ces deux états. Ce n'est que lorsque nous ouvrons finalement la boite que l'un des deux états possibles devient la réalité. Le chat est alors soit vivant, soit mort.

Les sociologues connaissent, eux aussi, des difficultés au plan de l'observation et de la description de la réalité. Ils ne partagent pas nécessairement la même représentation mentale de la réalité sociale. Là où certains voient une multitude d’acteurs individuels poursuivant chacun leur propre logique, d’autres considèrent que les groupes sociaux, dont les individus font partie, ont une action prépondérante. Une représentation permet de décoder une réalité sociale complexe en lui appliquant un “schéma de perception” réduit à quelques éléments et relations essentiels. Ainsi, les concepts de "catégorie sociale", "classe sociale", "groupe social", traduisent chacun une forme de représentation sociale, une “vision” du monde. Pour éviter une représentation subjective, celle-ci devrait, selon certains, être “savante” : classements, modèles et théories élaborés par l’étude scientifique (et donc rationnelle) des faits sociaux.

En intelligence artificielle, on sait qu'une représentation ou une description parfaite de la réalité est impossible. La représentation, dans la mémoire d'un ordinateur, d'une "forme" au sens large (geste, parole, écriture, etc) nécéssiterait une infinité de variables alors, qu'en pratique, on doit se limiter à un nombre fini de variables descriptives, ne serait ce que pour des raisons de place en mémoire de la machine. Pensons, par exemple, au nombre de variables nécessaires pour représenter en mémoire une personne humaine. On pourrait la décrire par sa taille, son poids, sa pointure de chaussure, la couleur de ses yeux, celle de sa peau, son tour de taille etc. Où doit-on s'arréter ?

Pour dire les choses simplement, nous diront que la traduction d'une réalité par un observateur, quel qu'il soit, en vue de la faire partager par d'autres, est une opération qui présente bien des difficultés. En effet, outre les difficultés soulevées au niveau atomique, les faits sont appréhendés au travers de multiples prismes déformants parmi lesquels on peut citer : la culture (de l'émetteur et du récepteur), les objectifs visés qui peuvent différer selon, par exemple, les choix politiques des individus, l'état mental des personnes (un observateur ou un récepteur déprimé ne sera probablement pas équivalent à un individu en pleine forme)...

Dès lors, il n'est pas surprenant de constater, à travers les médias par exemple, combien un même évènement peut être traiter de façons diverses. Les récentes grèves, à l'occasion de la modification de la loi sur les retraites en France, nous ont permis de percevoir concrètement ce phénomène. Pour les syndicats et pour la presse de gauche qui soutenaient ce mouvement, il avait son origine dans la souffrance subie par les travailleurs au cours de leur vie professionnelle. Il était parfaitement juste et le Gouvernement français se devait de tenir compte de l'expression du mécontement relatif à la nouvelle loi. Le point de vue économique était mis en avant par les partis et la presse de droite qui insistaient, eux, sur la nécessité d'ajuster les paramètres économiques au vieillissement de la population française afin d'éviter une faillite future du pays qui croulerait sous les dettes. Depuis l'étranger, les observateurs insistaient plutôt sur la paralysie de la France qui résultait de ces mouvements de grève. Les autorités des Etats-unis d'Amérique et du Royaume uni, notamment, ont même été jusqu'à recommander à leurs ressortissants de ne pas se déplacer en France...

On voit là combien une même réalité est difficile à traduire par des observateurs distincts. Mais, pire encore, la réception des informations souffre, elle aussi, des mêmes maux. Certains pourront effectivement croire que la France est au bord du gouffre. D'autres, au contraire, verront dans ces évènements l'expression du sens critique des français et leur propension à faire évoluer les décisions politiques par les manifestations de masse. D'autres encore insisteront sur le caractère culturel, ludique et festif de ces manifestations qui sont un moyen pour le peuple français d'entretenir le lien social dont il est friand...

Que doit-on déduire de ces difficultés à appréhender l'objectivité d'une réalité ? A mon avis, il serait essentiel que les décideurs (politiques notamment) prennent mieux en compte ce phénomène, de la relativité de certaines visions, de la diversité des points de vue, et qu'ils en viennent à traduire cette situation par une attitude plus tolérante, plus conciliatrice. Qu'ils manifestent plus d'empathie envers les personnes dont ils sont les représentants, élus ou non. Les acteurs devraient être convaincus que leurs points de vue diversifiés ont été, au moins partiellement, entendus. Cela nécessite du temps, bien sûr, mais aussi de la pédagogie. Les partis politiques, les responsables d'entreprises notamment, devraient tenter plus souvent de débattre sereinement des différents points de vue en présence et éviter les "passages en force" qui ne peuvent consister qu'en des victoires à court terme, tandis que les problèmes de fond, les insatisfactions finiront toujours par ressurgir un jour ou l'autre....

vendredi 29 octobre 2010

La dynamique du libre-échange

Récemment, j'entendais sur une chaine de la télévision française (émission « Face aux français » sur France 2) un débat qui opposait un homme de gauche en la personne de Jean-Luc. Mélanchon à un homme politique de droite, Luc Ferry. Au cours de cette séquence, la question du libre-échange a été abordée et à donner l'occasion aux deux protagonistes de présenter deux visions diamétralement opposées.

Pour L. Ferry, le libre-échange a permis, en association avec le capitalisme et le libéralisme de libérer les énergies productives et donc, de favoriser le développement économique de la France notamment. Un de ses arguments principaux consistait à se référer à une période de l'histoire de France pendant laquelle le libre-échange était encore peu développé, soit le 19è siècle, pour constater l'état de misère du pays à cette époque. Cette situation a d'ailleurs été décrite par nombre d'écrivains au rang desquels figure Emile Zola et ses romans tels : la bête humaine, Germinal,.... Pour Ferry, c'est l'abaissement des frontières douanières qui a permis à la production économique française de gagner de nouveaux marchés et qui a permis l'essor économique du pays. Cet argument semble incontestable et justifie, aux yeux de nombreuses personnes, le soutien à une politique de libéralisation, tous azimuts, des échanges, le choix en faveur de la libre concurrence des producteurs sur des marchés devenus mondialisés.

Pour L. Mélanchon, le diagnostic est radicalement opposé : le libre-échange, en laissant agir librement les marchés, a conduit à la destruction du tissu productif national. Il a mené à la délocalisation des emplois qui ont été relocalisés au sein des pays émergents où le coût de la main-d'oeuvre est moindre. Pour lui, il est donc urgent de revenir à un certain niveau de protectionnisme si l'on veut favoriser, tant soit peu, le renforcement de la production économique en France notamment. L'argument là aussi semble difficile à contester car, chacun peut constater tous les jours les dégâts causés par la politique libérale sur le niveau de l'emploi. Le taux relativement élevé du chômage dans plusieurs pays développés est directement en rapport avec les effets de cette politique de libéralisation des marchés.

A mon avis, cependant, ces deux diagnostics contradictoires et, qui opposent constamment la droite et la gauche en France, ne sont, en réalité, pas si antagonistes qu'ils ne le paraissent au premier abord. En effet, ils ne font que refléter, à mon sens, deux moments différents dans l'évolution de l'économie d'un pays sous l'emprise du libre-échange. Sans être un économiste, ni un expert, il me semble que le mécanisme mis en oeuvre par le libre-échangisme pourrait être décrit de la façon suivante :
Jusqu'au 19è siècle environ, les outils de production sont essentiellement localisés au sein des pays les plus riches (Europe et Amérique du Nord notamment) tandis que les marchés de consommation sont généralement restreints à l'intérieur des frontières nationales des Etats ainsi qu'à certains pays moins développés qui, suite à la colonisation, font encore partie des « chasses gardées » des Etats les plus riches. L'abaissement des frontières douanières, prôné par le libre-échange, va permettre aux producteurs de ces pays de conquérir de nouveaux marchés à l'extérieur des nations. Cet abaissement va contribuer à créer un grand marché mondialisé constitué, partiellement, par les consommateurs des pays les moins développés. Dans le même temps, cette politique va mettre en concurrence, au sein des nouveaux marchés mondiaux, les producteurs des pays riches qui, désormais, vont devoir se battre pour conquérir les marchés et vont donc se trouver dans l'obligation d'abaisser leurs coûts de production de façon importante. Pour cela, ils sont amenés à délocaliser de plus en plus les emplois dans les zones de la planète où ces coûts sont les plus faibles, soit vers les pays émergents. C'est ainsi que progressivement, les pays riches vont passer de la situation de pays producteurs à celle de pays consommateurs de biens qui proviendront désormais des pays émergents.

On voit donc que le diagnostic mis en avant par L. Ferry et par les partis de droite en général correspond, en fait, à limiter l'analyse à la période du début de la mise en oeuvre des politiques de libre-échange. Au cours de cette période, faste pour les économies des pays riches, les barrières douanières venaient d'être abaissées, favorisant un appel de la production de biens au profit des producteurs de l'époque qui étaient, généralement, situés dans les pays les plus riches. L'autre diagnostic, mis en avant par J.L. Mélanchon et par les partis politiques de gauche généralement, concentre l'analyse sur une période plus tardive, plus contemporaine, qui constate l'échec de la politique de libre-échange en matière d'emploi notamment, au sein des anciens pays producteurs, relégués au statut de pays plus consommateurs que producteurs. Le retour de la production vers les pays les plus riches ne peut donc se faire qu'en mettant en place un certain niveau de protectionnisme aux frontières de ces pays. L'objectif étant de permettre à la production de biens de se développer en étant à l'abri de la concurrence féroce des nouveaux pays producteurs.

Il me semble que le développement harmonieux des pays de la planète ne pourra se faire qu'en recherchant un optimum entre la suppression des barrières douanières prônée par les tenants du libéralisme et la fermeture des frontières revendiquées par certains nationalistes de courte vue. Les partis politiques de droite et de gauche auraient donc tout à gagner à débattre sereinement du choix de cet optimum plutôt que de s'opposer de façon stérile à partir de deux visions trop partielles d'un phénomène complexe.

L'aliénation du cinéma français

Depuis un certain nombre d'années, j'ai pu noté une tendance forte, sinon constante du cinéma français : il s'agit du choix systématique de chansons anglophones pour la bande sonore des films. Cette façon de faire quasi permanente me semble d'autant plus irritante et injustifiée que, par ailleurs les acteurs de la culture en France insistent souvent sur la nécessité de résister à l'envahissement de la culture globalisée américano-anglaise. Le très récent film de Guillaume Canet intitulé « Les petits mouchoirs » qui se déroule intégralement en France et, avec un ensemble d'acteurs français, constitue un exemple frappant de cette façon de procéder. Pas une seule chanson de la bande sonore de ce film n'est en langue française, toutes sont en anglais. Tout se passe donc comme si les réalisateurs français avaient décidés de ne pas soutenir la chanson française ou même francophone. Comme si, l'union des forces de la culture n'était pas nécessaire à la résistance à l'envahissement de la culture anglophone. Certains observateurs ont déjà eu l'occasion d'insister sur leur trouble face au choix de plus en plus fréquent des chanteurs français ou francophones de s'exprimer en anglais. Cette tendance est aujourd'hui renforcée par les réalisateurs français qui font ce choix délibéré comme si le répertoire de la chanson francophone n'était pas à même de fournir suffisamment de choix à ces auteurs... Imaginons demain, que les écrivains français se mettent eux aussi, pour des raisons économiques, à écrire (ou à traduire) leurs ouvrages en anglais. Que resterait-il alors de la culture française ? Les auteurs francophones du monde culturel auraient tout intérêt à réfléchir à leurs choix linguistiques, faute de quoi ils risquent de contribuer eux-mêmes à creuser leur propre tombe....

dimanche 12 septembre 2010

Encore les langues....

L'Allemagne découvre à son tour (voir Intégration : Berlin mise sur la maîtrise de l'allemand, Journal "Le Monde" du 10 septembre 2010) que l'intégration de ses immigrants passe par un apprentissage plus poussé de la langue allemande. Ce problème n'est pas nouveau il est bien connu et, depuis longtemps, de nombreux Etats parmi lesquels on peut citer, sans être exhaustif, la France, le Royaume-Uni, le Quebec, .... et, plus récemment, les Etats-unis d'Amérique, l'Ontario et certaines autres provinces de l'ouest du Canada. Ces Etats et Gouvernements sont préoccupés par cette question de la maîtrise de la langue du pays d'accueil par les nouveaux immigrants car il s'agit là d'un facteur déterminant pour leur intégration à la société.

Ce regain pour la défense de la "langue nationale" se produit simultanément à l'affirmation, par nombre de décideurs politiques, entrepreneurs ou chercheurs.... de la nécessité inéluctable d'apprendre une même langue pour pouvoir communiquer au plan international. Cette langue étant, le plus souvent l'anglais et, quelque fois l'espéranto.

Ainsi, une même cause, la mondialisation, produit deux effets inverses et, par certains côtés, contradictoires : d'une part, l'uniformisation linguistique par l'apprentissage préconisé d'une même langue pour tous et, d'autre part, la diversification linguistique par la réaction des communautés des pays d'accueil.

Les choses se complexifient encore plus, lorsque l'on considère que dans les pays qui absorbent, volontairement ou non, un nombre important d'immigrants, se créent souvent des "pôches ethniques" qui tendent à favoriser la mise en place, au sein de ces pays, et parfois contre leur gré, des politiques multiculturalistes. Ainsi, selon les données du recensement de 2001 de Statistique Canada, il y avait à cette date plus de 254 "enclaves ethniques" au Canada. De ce nombre, 135 se trouvent à Toronto, 111 à Vancouver et 8 à Montréal (voir Multiculturel, dites-vous?, Journal "Le Devoir" du 29 mai 2010). Ces enclaves développent en leur sein leur(s) propre(s) langue(s) de communication qui sont le plus souvent les langues parlées dans leur pays d'origine. De cette façon, la (ou plus rarement les) langue(s) nationale(s) se trouve(nt) confrontée(s) à la pression de la langue anglaise d'une part, mais aussi à celles des langues étrangères parlées par les communautés immigrantes. Outre l'affaiblissement de la langue nationale, ce phénomène tend à produire, de plus en plus souvent, des effets de repli identifaire de la part des citoyens des pays d'accueil qui sont tentés de rejeter en bloc toute immigration étrangère.

Face à ces crispations nationales, il paraît illusoire de prôner, de surcroît, l'apprentissage d'une seule et même langue aux fins de la communication internationale. Toutes les langues ont droit à l'existence et les peuples acceptent mal de voir décliner leur langue de communication séculaire.

La seule et véritable solution nous semble de mettre en place, dans les pays du monde, un certain degré de multilinguisme afin de gérer la question de la communication internationale en portant, le moins possible, atteinte aux grandes langues de communication internationale (anglais, français, espagnol, portugais, arabe, allemand, italien, mandarin...). Cette approche exclut le bilinguisme du type "langue majoritaire-langue minoritaire" (par exemple : anglais-français) qui défavorise systématiquement la langue minoritaire. Nous avons démontré que cela est possible et que ni l'anglais seul, ni l'espéranto seul ne sont indispensables pour aboutir à la solution (voir http://diversion-baba.blogspot.com : la survie du français, billet du 20 mai 2010). Si chaque enfant pouvait apprendre trois ou quatre langues (y compris sa langue maternelle), choisies librement parmi une dizaine de langues de communication internationale, sans qu'aucune de ces trois ou quatre langues ne lui soit imposée, à lui ou à sa famille, sans que l'anglais soit systématiquement privilégié, parmi ces choix, comme aujourd'hui, on peut être certain de deux choses :

- La diversité linguistique du monde en sortirait renforcée;
- La communication internationale en serait facilitée.

Cette façon de faire garantirait que deux personnes qui se rencontreraient au hasard auraient alors environ 80% de chances de pouvoir communiquer dans une langue partagée (qui ne serait pas l'anglais obligatoirement). Il est clair qu'un jeune enfant étranger qui émigrerait avec ses parents serait astreint à la même règle. S'il est de langue maternelle arabe, par exemple, et qu'il émigre dans un pays de langue française, il lui faudrait apprendre le français et une ou deux autres langues de communication internationale.

mercredi 8 septembre 2010

Sur l'éducation des enfants.

L'éducation des enfants repose sur deux piliers principaux : l'école et les parents. On peut aussi faire intervenir d'autres acteurs comme la religion, les mouvements de jeunes, la famille.... Mais l'école et les parents sont les acteurs déterminants de cette partie de la vie humaine. En simplifiant, on pourrait dire que l'école s'occupe de la formation générale de l'enfant (apprentissage des connaissances, sociabilisation) tandis que les parents transmettent les valeurs morales, (honnêteté, ambition, ténacité, courage,....) Il paraît donc essentiel que ces deux piliers complémentaires se soutiennent pour réussir l'éducation.

Si ce soutien mutuel a existé par le passé, on constate, depuis quelques années, qu'il n'en est plus de même. Les parents sont entrés en force au sein des établissements scolaires et font entendre leur voix à la moindre occasion. Le danger de cette situation est que l'intervention des parents se déroule, trop souvent, sur un mode récriminatoire plutôt que de soutien aux enseignants. Tout se passe, comme si chaque enseignant se retrouvait en fait devant une tâche double : faire la classe à ses élèves d'une part, mais aussi, rendre des comptes aux nombreux parents des enfants dont il a la charge d'autre part. Dans le contexte actuel, où les parents ont peu d'enfants, chaque enfant est considéré avec beaucoup d'attention, ce qui peut aller jusqu'à une situation de sur protection de la part des parents. En outre, les classes sont aujourd'hui, souvent composées d'enfants d'origines culturelles diversifiées. Dès lors, on comprendra mieux la difficulté que rencontrent les enseignants à tenter de satisfaire l'ensemble des parents des élèves d'une même classe. Pire encore, la crainte de voir les parents s'opposer à l'administration scolaire fait que cette dernière à souvent tendance à se mettre à l'abri en demandant aux enseignants, notamment, d'éviter de prendre des mesures qui risqueraient de déplaire aux parents. Cette situation paralyse le corps enseignants qui, face à une difficulté créée par un élève, hésite à la prendre en charge au risque de se retrouver sur le banc des accusés. Il préfèrera alors, soit ignorer le problème, soit le renvoyer devant d'autres instances, soit, apposer un diagnostic qui le dédouane de ses responsabilités (devant un enfant agressif par exemple,...).

Bien entendu, on ne peut pas généraliser abusivement et considérer que cette analyse est irréfutable. Cependant, il me parait clair qu'elle concerne une partie non négligeable des milieux scolaire et parental. On peut d'ailleurs se demander ce qui se passerait si, de façon réciproque, les enseignants pénétraient à leur tour le milieu parental pour dicter aux parents l'attitude qu'ils devraient adopter dans telle ou telle situation de leur vie familiale? Que se passerait-il si les enseignants prenaient l'initiative de demander aux parents d'apprendre la discipline à leurs enfants ? On sait qu'une des difficultés des enseignants actuellement, est de faire transiter les enfants d'un monde dans lequel ils sont souvent considérés comme des "petits rois", au monde scolaire où il faut obligatoirement respecter une certaine discipline de groupe...

Soyons clairs, il ne faut pas ignorer les autres maux qui affectent le système éducatif : manque de ressources, formation insuffisante des enseignants, épuisement des professeurs, hétérogénéïté des classes,... Cependant, je crois qu'une des causes des problèmes rencontrés au cours de la scolarité des enfants vient de cette trop grande insertion des parents dans le monde scolaire. Chaque partie devrait, avant tout, s'occuper de ses propres responsabilités et faire confiance à l'autre partie pour ce qui la concerne. Que les parents prennent en charge sérieusement l'éducation de leurs enfants à la maison et que l'école se charge efficacement de leur transmettre les connaissances nécessaires à leur progression dans la vie... On pourra alors espérer observer moins de décrochages de la part de nos enfants...

dimanche 5 septembre 2010

La nouvelle façon de penser.

Le texte qui suit ne doit pas être pris à la lettre mais constitue plutôt l'affirmation d'une tendance qui n'excluent pas, qu'ici ou là, des individus puissent continuer à penser selon le mode traditionnel. Notre propos, ici, est plus de mettre en exergue des orientations générales dans l'évolution de notre mode de pensée.

Au sens large, la pensée est l'activité psychique consciente dans son ensemble, les processus par lesquels l'être humain élabore, au contact de la réalité, des concepts qu'il associe pour apprendre ou pour créer. Penser, c'est produire des idées, concevoir des concepts ou des opinions à partir de la réflexion intellectuelle, de l'intelligence.
La pensée c'est aussi, une représentation psychique, un ensemble d'idées propres à un individu ou à un groupe, une façon de juger, une opinion, un trait de caractère, etc.

Ce que chacun peut constater aujourd'hui c'est que nous ne calculons plus (au sens du calcul mental) puisque les calculettes et les ordinateurs le font à notre place. Nous n'écrivons plus (au sens de l'écriture manuscrite) puisque les claviers d'ordinateurs et de téléphones portables sont devenus des intermédiaires incontournables. Nous ne lisons plus (au sens de la lecture de documents en papier comme les livres ou les journaux) puisque les écrans de télévisions, d'ordinateurs, de téléphones mobiles sont nos compagnons quotidiens. Nous ne sentons et ne touchons plus puisque nous pratiquons de moins en moins la cuisine, le bricolage, la mécanique (pensons aux réparations de nos automobiles...). Nous ne discutons plus, puisque nous sommes de plus en plus souvent physiquement isolés et branchés sur nos systèmes de sons électroniques, parceque les familles sont éclatées et que les débats familiaux se font plus rares. Nos sens sont de moins en moins au contact de la nature brute puisque celle-ci s'éloigne de plus en plus de nous et que nos activités se déroulent majoritairement en intérieur... Notre approche du monde réel se fait, le plus souvent, à travers la réalité virtuelle présentée sur nos écrans.... Même l'activité physique, qui sert à développer nos muscles et nos sens, se fait plus rare au point que l'obésité nous gagne. L'activité d'analyse intellectuelle diminue elle aussi car elle requiert la lecture approfondie de textes et le temps de la réflexion. Or, la lecture approfondie ne peut se faire sur un écran d'ordinateur où seuls sont retenus les gros titres, les accroches...et le temps nécessaire à la pensée lui se fait rare car, comme on le dit souvent, "le temps c'est de l'argent" et l'argent, devenu la valeur essentielle, ne doit pas être perdu.
Même les langues sont aujourd'hui atteintes par une lente dégradation de leur rigueur de leur précision, due, le plus souvent, à des "frottements avec la langue dominante, l'anglo-américain, qui, par des effets de mode, conduisent à des approximations grammaticales, syntaxiques et lexicales. On perd en précision or, comme écrivait Albert Camus, "Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde". On oublie le précepte de Nicolas Boileau "Ce qui se conçoit bien, s'énonce clairement- Et les mots pour le dire viennent aisément".
L'université, elle-même, forme de moins en moins au développement de l'esprit critique, les chercheurs, les enseignants et les administrateurs de l'institution étant désormais dépendants des financements liés, offerts par les entreprises privées. La perte de liberté de choix qui s'ensuit, pour les enseignants-chercheurs notamment, est peu propice à la valorisation de l'esprit critique...

D'ailleurs, les effets de cette évolution sur la pensée contemporaine sont perceptibles. On entend très souvent des jugements ou des appréciations qui s'expriment en deux ou trois mots : "c'est cool", "c'est cute", "interéssant", "c'est le fun", ou plus précis encore, "c'est super le fun", "c'est bon",.... Parfois certains jeunes adultes font des confidences surprenantes : récemment une jeune ingénieure franco-algérienne me disait "je suis incapable de voir des films français car ils ne contiennent pas assez d'action, ils ne sont pas assez spectaculaires comme le sont les films américains". L'analyse politique est souvent limitée à des jugements superficiels : "il (ou elle) est beau", "il (ou elle) ne sait pas s'exprimer", "elle (ou il) est mal vêtue", "Moi, je n'aime pas beaucoup les élections",...

Tout se passe comme si l'analyse intellectuelle devait se limiter à une simple expression d'affectivité, comme si la pensée était de moins en moins structurée car, ayant peu d'occasions de s'exercer à l'être... Le fouillis des références accumulées sur Internet tend à produire, chez certaines personnes, un discours confus peu propice à l'action.
Ce "déficit de pensée" pourrait, peut être, expliquer l'absence de projets politiques d'envergure qui s'observe un peu partout dans le monde.

Il existe deux principales écoles d'apprentissage de la pensée : la formation (primaire, secondaire et supérieure) et l'éducation parentale. Il se trouve que ces deux écoles sont aujourd'hui en crise. La formation d'abord, parcequ'elle souffre de la démocratisation des institutions, placées devant l'obligation d'accueillir de plus en plus d'apprenants avec des moyens et des ressources qui n'ont pas suivis. L'éducation par les parents qui a pâtit de la crise du couple, des divorces et du manque de temps des parents à consacrer à l'éducation de leurs enfants, les deux parents étant obligés de travailler pour faire face aux besoins du couple, tandis que la productivité du travail croît régulièrement.

Les solutions ? J'en vois au moins deux types :
- Renforcer les valeurs morales, l'éthique des individus à travers l'éducation parentale notamment, mais aussi en s'appuyant sur les religions, les syndicats, les partis politiques, les associations,...
- Redonner à l'école et, singulièrement, aux universités le rôle essentiel de former à l'esprit critique en s'aidant, notamment, de l'enseignement et de la recherche en Histoire et en Philosophie des Sciences, en Ethique, et en permettant aux universitaires d'exercer leur droit à la liberté de penser.

lundi 30 août 2010

Diversité culturelle : la question du Droit.

Depuis mon installation au Québec, j'avais noté avec une certaine surprise que nombre de questions sociétales (problèmes d'exploitation minière, sort des détenus de Guantanamo, questions de génie civil, mariage homosexuel, équité salariale, problèmes linguistiques, etc) aboutissaient souvent à la Cour suprême du Canada, plutôt qu'à la Chambre des Communes fédérale ou aux différentes assemblées nationales provinciales du pays. La Cour suprême du Canada est la plus haute Cour du Canada et est située dans la capitale fédérale, Ottawa. Elle constitue l'ultime recours juridique pour tous les plaideurs en matière civile, criminelle ou administrative.

Il me semblait que le législatif se trouvait un peu dépossédé d'une partie de ses responsabilités au profit du judiciaire. Désirant approfondir cette différence avec certains Etats européens où les parlements semblent intervenir de façon plus décisionnelle, je me suis penché sur les statistiques en matière d'avocats. Là, je découvre une nouvelle surprise : alors qu'en France, par exemple, on dénombre environ 50 000 avocats, soit environ 81 avocats pour 100 000 habitants, aux USA on compte environ 1000 000 d'avocats, soit à peu près 300 avocats pour 100 000 habitants. Cela représente près de 4 fois plus d'avocats par habitant qu'en France. Au Canada, on compte environ 100 000 avocats (et notaires qui, ici secondent les avocats), soit à peu près 340 avocats pour 100 000 habitants. Le Canada se trouve donc dans une situation proche de celle des USA en ce domaine.
La question qui se pose est donc : pourquoi une telle différence entre l'Amérique du nord et une partie de l'Europe ? Une probable explication repose, à mon avis, sur les textes de lois qui régissent d'une part, les pays d'Amérique du nord, la "Common law", et, d'autre part, certains pays européens, soit le "Code civil".

La "Common law" est un système de droit issu des décisions des cours royales de justice de l'Angleterre depuis la conquête normande (1066). De nos jours, la Common law, envisagée de façon beaucoup plus large, englobe les lois aussi bien que la jurisprudence. Elle s'applique dans la plupart des pays de langue anglaise, y compris toutes les provinces canadiennes, à l'exception du Québec où le droit est aussi influencé par le droit civil français. Dans la Common law, les décisions judiciaires sont principalement basées sur la jurisprudence. Le "Code civil" est un texte législatif fondamental qui comprend un recueil complet du droit privé d'un pays. C'est un texte que l'on trouve généralement dans les systèmes juridiques dont la tradition remonte au droit romain. Ici, tout est écrit d'avance et ce document est la référence fondamentale en matière juridique. Seul un texte de loi, voté par le Parlement, peut modifier le Code. Dans les systèmes de droit codifié, les lois ordinaires portant sur les matières de droit privé doivent être évitées. De plus, par contraste avec les systèmes de droit non codifié, la jurisprudence n'est pas systématiquement considérée comme source de droit.

Sans en être certain totalement, il me semble que les différences observées (rôle de la Cour suprême, nombre d'avocats,...) entre les pays d'Amérique du nord et certains pays d'Europe pourraient s'expliquer par la différence culturelle en matière de droit. Dans les pays régit par la Common law, l'établissement des droits de l'individu ou des institutions requiert un effort supérieur car il faut non seulement défendre mais aussi créer le droit dans le même mouvement. Tandis que, lorsque c'est le Code civil qui est appliqué, il suffit de faire référence aux textes de lois ce qui necéssite un moindre effort. On peut trouver là, une explication à la différence observée entre les nombres d'avocats dans les deux contextes. Certains ont même été jusqu'à évoquer la "dictature des avocats" en Amérique du nord....

vendredi 27 août 2010

Le problème des ROMs en Europe : un exemple de tessélation du monde

Dans une récente chronique (21 août 2010), j'attirais l'attention sur les dangers d'incohérence des actions politiques visant à résoudre des problèmes planétaires menées par des gouvernements divisés. Le récent renvoi en Roumanie des ROMs de France par le Gouvernement français de N. Sarkozy me semble constituer une illustration concrète de ce phénomène. En effet, le Gouvernement français se trouve placé dans l'obligation de gérer la question de l'arrivée des ROMs en France, tandis que le Gouvernement roumain n'a pas su trouver de solution au problème de leur intégration dans la société roumaine aboutissant à la marginalisation de cette minorité. On voit bien ici que les deux gouvernements prennent des mesures incohérentes qui ont peu de chance de régler les difficultés de cette catégorie de citoyens européens. Pire encore, le gouvernement italien, aux prises avec le même problème d'immigration des ROMs, menace à son tour de prendre des dispositions différentes (expulsion sur le modèle des immigrés clandestins) de celles adoptées par la France (retour volontaire). La question des ROMs est un problème européen qui découle de la liberté de circuler au sein de l'Union européenne, liberté instituée par les autorités européennes. Cette question mérite donc, non pas une réponse bilatérale, au cas par cas, mais bien une solution élaborée au plan européen, faute de quoi les solutions apportées ici ou là ne seront que partielles et donc inefficaces. D'ailleurs dès 2008, le gouvernement roumain a réclamé un programme d'intégration des ROMs au niveau européen. Imaginons que demain, un autre Etat de l'Union, soit confronté à ce problème et adopte des solutions différentes.... On aurait là un tissu d'incohérences propres à aggraver la situation des ROMs plutôt qu'à la faciliter...

samedi 21 août 2010

Retour des Iles-de-la Madeleine

Après avoir passé une semaine aux Iles de la Madeleine voici deux aspects de notre voyage, l'un négatif et l'autre très positif :

Le Contre :

Je voudrais partager mon étonnement sur un point. Nous avons effectué le trajet de Montreal jusqu'à Cap-aux-Meules en voiture en passant par la ville de Souris dans l'Ile du Prince Edouard, puis en bateau de Souris aux Iles. Jusqu'à Souris, tout allait bien, nos téléphones portables (Fido, Rogers) fonctionnaient parfaitement, tant au Nouveau-Brunswick que sur l'Ile du Prince Edouard. Une fois parvenus à Cap-aux-Meules tout change : plus de réseau, nos téléphones restent muets et pourtant, nous sommes de nouveau au Québec... Etonnés, nous nous renseignons auprès de la population locale qui nous confirme qu'aux Iles ni Rogers ni Fido ne fonctionnent..... Nous sommes extrèmement surpris et déçus, car ces réseaux se vantent d'être internationaux et d'ailleurs, nous avons pu constater que même à Haïti Rogers fonctionne..... Les Îles de la Madeleine, même si le drapeau acadien flotte partout, sont une partie du territoire de la province de Quebec. Dès lors, pourquoi ce traitement singulier ?

Le Pour :

Les bijoux du Golfe

Madeleine, îles aux mille couleurs,
Votre habitat forme un patchwork inoubliable.
Iles féminines, aux formes douces,
Soulignées de dunes ocrées de sable fin qui
Ceinturent les plages vert tendre de vos vastes pelouses...
Fôrets denses, marais, dits "barachois", douces collines, plaines humides,
Etranges loups de mer, rouges homards, crevettes grises,
Gracieux pluviers, hérons longilignes... toute une faune surprenante.
Vous êtes la diversité surgie du bleu lumineux du golfe originel.
Votre création aussi est unique,
Issues de poussées verticales de sel marin accumulé et densifié au fond de l'océan au fil des millénaires.
Le souffle de vos vents, peigne d'ondulations les rivages de vos côtes.
Telle une femme rebelle, il faut savoir vous gagner, vous conquérir,
Vous, si lointaines et pourtant si accueillantes.
Fières acadiennes, inventives, joyeuses et jamais soumises.
Les souffrances subies lors du "Grand Dérangement" ne sont pourtant pas prêtes d'être oubliées...
Aujourd'hui encore vous faites toujours entendre fièrement la langue française aux quatres coins du pays.
Vous qui, des fûts de bois hier, avez bâti le "ponchon" et,
aujourd'hui, l'image de la fameuse bière "A l'abri de la tempête".
La gigue et les contes du mémorable Gilles Lapierre,
la pièce "Mes îles mon pays" de Yolande Painchaud,
les "Spécimens" caricaturaux de vos hommes célèbres,
les originales sculptures de sable du Havre Aubert...
sont des témoignages artistiques et ingénieux de votre culture.
Couchers de soleil multicolores au pied d'un phare de "Cap aux meules", teintes magiques au flan de vos falaises rouges....
Fiers Madelinots, pêcheurs courageux, dignes descendants des ancêtres basques et bretons.
Artisans de la "pêche aux cages", vous fournissez la cuisine locale pour les succulents "pot en pots", chaudrées à base de crustacés, coquillages et poissons ....
Vos fumoirs conditionnent harengs, saumons, maquereaux.... les imprégnant de vos senteurs boisées.
Belles îles, dont les paysages rappelent souvent d'autres îles plus tropicales,
Vos lieux-dits nous enchantent et nous font rêver : "Martinique", "Fatima", "Pointe aux loups", "Grande échouerie", "Havre aux Basques", "Butte-du-vent", "Les Demoiselles",...
Même la redoutable "Bagosse" n'est pas prête de nous faire oublier les splendeurs dont vous nous avez comblées...
Tel Gabriel pleurant son Evangéline, nous garderons toujours en nous un manque, une absence, que seul un nouveau retour vers vous pourra, peut-être, combler...