De tous temps les frontières ont été des causes de conflits, de difficultés de toutes sortes. Il n’est point besoin d’être historien pour être capable d’effectuer ce constat. Aujourd’hui encore, ces mêmes frontières sont toujours la raison de conflits, même si leur importance nous parait parfois moindre car se situant dans des régions plus éloignées de nous. Le plus surprenant est la rémanence de ces frontières, alors même qu’elles n’ont plus d’existence administrative ou politique. Pour s’en convaincre, il suffit de penser à l’Union européenne (UE) qui, bien qu’ayant abolie la nécessité de présenter un passeport pour les citoyens des pays membres, est toujours en proie à des accès de national-chauvinisme plus ou moins marqués. Même les sports sont l’occasion d’exprimer ce sentiment national alors même qu’il aurait été plus normal que cette expression de notre humanisme soit privée de ces aspects négatifs.
Le monde est quotidiennement la proie de catastrophes plus ou moins ponctuelles liées au changements climatiques d'une part, mais aussi au libéralisme outrancier qui a été élevé au rang de dogme au cours des années récentes. Les exemples de ces évènements malheureux ne manquent pas : inondations récentes au Pakistan, en Chine, en Europe,..., marée noire en Louisiane et ailleurs, tempêtes tropicales de plus en plus destructrices, crise des « subprimes », scandales financiers à répétitions, chômage, migrations clandestines etc. Pourtant, les Etats et Gouvernements s'évertuent à tenter de résoudre ces crises par des approches nationales faisant, tout au plus appel à l’aide internationale dans certains cas graves de catastrophe naturelle. Pire encore, même lorsque ces Etats et Gouvernements ont pris la décision de s'unir, sous une forme ou une autre, afin de se renforcer, ils continuent d'avoir des approches plus nationales qu'internationales. L'Europe donne encore un exemple de cette tendance générale. Si l'on considère, la question du chômage en France, il apparaît que les solutions avancées par le gouvernement français sont toujours loin de donner les résultats escomptés. Il en va de même en Espagne, au Portugal, en Italie.... et dans bien d'autres des pays de l'Union. Il nous semble pourtant qu'une tentative de résoudre cette question à l'échelle européenne plutôt que nationale aurait plus de chance de réussir, compte tenu de l'imbrication croissante des économies des nations européennes. Il en va de même pour d'autres types de structures intergouvernementales. La fédération canadienne en est un autre exemple. Chaque Province tente de résoudre de son côté, et avec ses propres approches, ses difficultés de façon indépendante des autres provinces du pays. Le gouvernement fédéral ne peut, généralement que proposer des solutions qui se superposent aux actions mises en place au plan provincial.
Il existe pourtant des preuves de succès de l'approche intégrée par rapport à la nationale. Citons en vrac : Airbus, Ariane-espace ou l'euro pour l'Union européenne. L'atténuation des déséquilibres économiques au sein de l'UE ont aussi été favorisés par l'approche intégrée. C'est ainsi que l'Espagne, la Grèce, l'Irlande,... ont pu rattraper une grande partie de leur retard de développement par rapport aux nations européennes les plus riches. Aux USA, l'amélioration du système de santé a été obtenue par une action au niveau fédéral. En Afrique de l'Ouest, la monnaie unique est soutenue par l'UMEOA (Union Economique et Monétaire Ouest Africaine)....
Face à cette situation que pouvons nous faire ? L’abolition progressive des frontières, même si elle ne gomme pas totalement les rivalités inter-pays, reste à notre avis une voie prometteuse. Les grands ensembles politico-économiques qui se sont créés ces dernières années, comme l’ASEAN (Association des Nations de l'Asie du Sud-Est), l’ALENA (Accord de Libre-Echange Nord Américain), l’UA (Union Africaine)… auraient tout intérêt à suivre l’exemple européen pour parfaire leur degré d’intégration. Il est très surprenant de voir que certains de ces ensembles évoluent en sens inverse comme c’est, notamment, le cas de l’ALENA qui ne cesse de renforcer ses frontières au sein de l’union (récemment le Canada a obligé les Mexicains à prendre un visa touristique ; les USA ne cessent d’étendre le mur qui les séparent du Mexique…). En Afrique, le développement de l’intégration aurait peut être pu éviter les récents conflits en Côte-d’Ivoire, au Zaïre et la chasse aux étrangers en Afrique du Sud… L’abolition progressive des frontières entre les pays riches et les pays pauvres pourrait contribuer à l’établissement d’un re équilibrage économique entre ces pays. En effet, la libre circulation des personnes permettrait aux émigrants issus du Sud de revenir plus facilement et plus fréquemment chez eux et les citoyens des pays du nord pourraient plus facilement collaborer au développement du Sud.
Cette façon de faire procurerait rapidement des économies substantielles par la suppression qu’elle implique de nombreuses administrations liées à la surveillance du passage des frontières par les personnes. La circulation intensifiée des citoyens entre les pays devrait pousser les Etats et Gouvernements à mettre progressivement en place des politiques de gestion des grands problèmes de notre monde qui soient plus intégrés, plus multilatérales. Il est, en effet, clair que ces problèmes (pollution, réchauffement climatique, migrations, circulation des biens et des capitaux, développement durable, fiscalité, pandémies,…) se posent très souvent à l’échelle planétaire et pas seulement à une échelle nationale. L’intégration politique plus poussée serait à coup sûr un bon moyen pour mettre en place des politiques mieux à même d’apporter des solutions efficaces.
Finalement, tout se passe comme si les frontières et les gouvernements superposaient sur notre planète un réseau réticulé, une sorte de tessélation mathématique. La tessélation est une opération mathématique couramment utilisée en géométrie 3D, notamment dans les cartes graphiques 3D. Cette opération consiste à paver une surface avec un même motif. Cette transformation d’image en polygones est essentielle dans le graphisme des jeux vidéo. Les pays ou les Etats se situant à l’intérieur des zones réticulées ainsi constituées. Une bonne image de ce type de structure est donnée par un pare-brise d’automobile ayant reçu un impact. Le pare-brise ne se détruit pas mais se couvre d’un réseau de fissures reliées les unes aux autres qui délimitent sur le pare-brise des régions où le verre est intact. Généralement, le "fissurage" du pare-brise est un état qui précède sa destruction totale. On peut alors assimiler ces zones intactes aux territoires des nations ou des Etats, tandis que le réseau représenterait les frontières.
Lorsqu’un problème commun à l’ensemble des pays de la planète se présente, chaque gouvernements agissant de façon indépendante des autres, cela a tendance à produire une action incohérente et désordonnée qui au lieu de résoudre la difficulté aurait plutôt l'effet de l’aggraver. Tout se passe un peu comme si sur le pare-brise, chaque morceau de verre intact imposait une force indépendamment des autres morceaux en vue d’empêcher la rupture du pare-brise. Cette façon de faire produisant un ensemble de forces incohérentes aurait toutes les chances de conduire à la rupture du pare-brise, soit à l’inverse du résultat recherché.
Pour que les différents gouvernements du monde puissent se coordonner afin de résoudre les problèmes communs à la planète, il faudrait, au minimum, redonner aux organisations internationales, multilatérales une audience importante, notamment auprès des décideurs, écoute qu'elles sont encore loin d'avoir acquise. Elles pourraient alors jouer un rôle d'orientation, de coordination au plan mondial et guideraient toutes les politiques nationales dans un sens cohérent. Cette façon de faire, en se basant sur plusieurs "centres internationaux de conseils" indépendants mais chacun spécialisé dans un grand domaine, permettrait d'éviter l'utopie du « gouvernement mondial » tout en facilitant la résolution des grands problèmes planétaires par les gouvernements du monde.
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