lundi 28 mars 2011

Election ou malédiction ?


Le contexte électoral actuel dans le monde peut donner à réfléchir. En effet, dans les pays arabes, les citoyens sont prêts à donner leur vie afin d'installer la démocratie dans leur pays, et de pouvoir bénéficier, enfin, d'élections libres... Dans le même temps en France, au Canada et sans doute dans bien d'autres démocraties de type occidental, on constate un désintérêt, une désaffection des citoyens pour les processus électoraux.

En France, les récentes élections cantonales des 20 et 27 mars 2011, ont été marquées par des taux d'abstention importants : 55,68% au premier tour de scrutin et 54,97% au second tour. Les prochaines élections présidentielles de 2012 s'annoncent déjà dans de mauvaises conditions. La division règne au sein des états-majors politiques. Les « primaires » socialistes, par exemple, ne sont qu'un artifice pour tenter de dissimuler aux citoyens les rivalités entre des personnalités qui souhaitent toutes accaparer le pouvoir sans trop de considération pour l'intérêt général. A droite aussi les rivalités entre les candidats potentiels se font jour avec des justifications qui sont loin de prendre en compte l'intérêt national. Peut-on croire, en effet, que D. de Villepin ou F. Bayrou ou N. Sarkozy mèneraient, s'ils étaient élus, des politiques très différentes ? Toutes ces divisions, sur des bases plus personnelles que collectives, conduisent les citoyens français au refus de vote ou au vote extrémiste du type « Front national »... On est plus très loin du slogan des années 1968 « élections pièges à cons »...

Si l'on considère le Canada où des élections fédérales viennent d'être déclenchées par le Premier Ministre S. Harper, on se trouve, là aussi, dans une configuration susceptible de déprimer le citoyen. Les possibilités de choix entre des politiques distinctes pour le pays sont, en effet, plus que réduites. Deux grands partis se partagent le pouvoir depuis la création de la Confédération en 1867 : le Parti Conservateur au pouvoir actuellement et le Parti Libéral. Or, les programmes de ces deux partis sont très voisins et les différences semblent se limiter à des changements de personnalités plus qu'à de véritables orientations politiques.

La situation de la Province de Québec est encore plus difficile. En effet, depuis 1993, le « Bloc québécois » est censé représenter l'opposition du Québec au sein de la Confédération. Cette situation conduit nombre de citoyens du Québec à voter systématiquement pour ce parti en sachant qu'il ne parviendra jamais à prendre le pouvoir fédéral puisque les citoyens des neuf autres provinces ne se sentent pas représentés par ce parti. Dans la réalité, en voulant manifester leur opposition au pouvoir fédéral, le Bloc québécois ne fait que renforcer la fédération en détournant une partie des voix vers une opposition inefficace. Cette situation ne peut que réjouir les fédéralistes qui évitent ainsi d'avoir à faire face aux citoyens d'une des provinces les plus peuplée du Canada et qui conduit, dans les faits, à laisser les neuf autres provinces désigner les tenants du pouvoir à Ottawa. Le Québec n'a en réalité que deux choix : faire son indépendance ou intégrer la Confédération de façon pleine et entière. Par deux fois, les citoyens du Québec ont rejeté le premier choix. Lors des élections provinciales de 2003, le Parti québécois (parti souverainiste) a perdu la confrontation électorale, cédant le pouvoir au Parti Libéral de Jean Charest. Cette nouvelle configuration place les citoyens du Québec dans une position plus qu'inconfortable : alors qu'ils votent pour le Parti libéral aux élections provinciales, ils se trouvent conduits à voter pour le Bloc québécois (Parti souverainiste) aux élections fédérales.... Il est difficile de faire plus compliqué... Les forts taux d'abstention observés tant au plan fédéral (environ 41% en 2008) que provincial (environ 43% en 2008) témoignent de la perplexité des citoyens...

Dans les deux cas évoqués ici, celui de la France et celui du Québec, on peut avoir le sentiment que les responsables politiques mettent en avant leurs propres intérêts avant celui de la nation. Cette façon de penser ne peut qu'entretenir la confusion et alimenter la désaffection des citoyens envers les processus électoraux. Il serait temps de redonner espoir aux citoyens en leur proposant des programmes électoraux et des candidats capables de renforcer leurs motivations à participer aux processus électoraux. Sur le plan programmatique, les problèmes à résoudre ne manquent pas! La lutte contre l'appauvrissement, la formation et l'emploi des jeunes, le développement durable, la protection de l'environnement, le combat contre la corruption, etc. Pour les responsables politiques, la « potion » sera plus dure à avaler. Il faut cesser de considérer le pouvoir comme un pourvoyeur de privilèges de toutes sortes, il convient de redonner le pouvoir aux citoyens ordinaires, à ceux qui sont en contact avec la réalité de la vie quotidienne. Il faut abolir le métier de politicien... Les responsabilités politiques ne devraient êtres exercés que pendant un temps limité et confiées à des citoyens qui ne font pas de la politique leur métier... Mais cela ne doit pas exclure l'engagement des citoyens, leur droit à s'exprimer et à faire connaître leur point de vue. Eux aussi sont responsables de l'évolution des processus électoraux. Ils doivent cesser de considérer qu'une fois le pouvoir délégué, ils n'ont plus qu'à subir les décisions. Leur pouvoir est réel et les révoltes dans les pays arabes sont là pour en témoigner. Chacun d'entre nous se doit de s'exprimer, de faire connaître son avis aussi souvent que possible et pas seulement au moment des consultations électorales. Les intellectuels eux doivent jouer leur rôle de penseurs, d'esprits critiques capables de contribuer à la réflexion face à des situations confuses ou compliquées... Le Québec comme la France sont engagés dans des constructions supra nationales, la Confédération canadienne et l'Union européenne, il conviendrait, qu'enfin, les programmes électoraux et les candidats correspondants en tiennent compte... Où est le grand parti européen de gauche en France, où se trouve le grand parti de la gauche canadienne ?


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