jeudi 9 juin 2011

Le remède empoisonné

Les mesures d'austérité préconisées en Union Européenne (UE) en vue de tenter de juguler la crise actuelle (déficit public et endettement important) risquent d'achever le malade plutôt que de le guérir. Déjà, les observateurs notent la contraction significative de l'économie grecque sous l'effet des mesures d'austérité imposées à ce pays par le FMI et l'UE notamment. Les solutions misent en avant pour que ce pays puisse rembourser les 90 milliards d'euros de dettes à ses créanciers privés (banques allemandes et françaises majoritairement) dans les trois ans à venir, reposent principalement sur les privatisations de grands secteurs économiques et sur le licenciement de fonctionnaires. La crise s'est produite, essentiellement à cause du manque de réglementation de la spéculation financière. Or le remède préconisé recommande encore moins de règlements, moins d'Etat et de fonctionnaires.... Les cas du Portugal, de l'Espagne, de l'Irlande en attendant, peut être, d'autres pays (Etats-unis d'Amérique,...), se distinguent peu du schéma ci-dessus.

Il y a cependant un paradoxe qui n'est guère signalé par les commentateurs : la crise actuelle trouve son origine surtout dans le comportement des financiers (banques...) qui se sont permis de spéculer à tout crin, entrainant le monde dans une spirale d'endettement infernale. Or, aujourd'hui ce sont sur ces mêmes responsables financiers que l'on s'appuie pour gérer la sortie de crise! Le remboursement de la dette à tous prix, tout comme le refinancement des banques au moment de la crise déclenchée en 2007 par les grandes banques des Etats Unis d'Amérique, sont avant tout destinés à sauvegarder le secteur bancaire. Tout se passe comme si, on avait déjà oublié les méthodes dont sont capables ces « requins de la finance ».

Les créanciers qui ont poussé au surendettement devrait logiquement assumer une partie des efforts en vue de la résolution de la crise au lieu d'être absouts de toute pénalité. En outre, la pénalisation qui leur serait ainsi imposée pourrait contribuer a les faire changer de comportement à l'avenir, s'ils savent qu'il pourrait avoir un prix à payer en cas d'erreur de jugement. Il serait juste d'éviter que les créanciers privés puissent se dégager à bon compte et que les seuls grands perdants dans cette crise soient les malheureux citoyens sur qui reposeraient l'austérité et la rigueur.

On doit, en outre, prendre en compte que la sortie de crise doit aussi permettre de mettre en place des procédures fiables capables d'éviter le renouvellement du même type d'erreur à l'avenir. Autrement dit, cette sortie doit s'accompagner de la production de règlementations et d'un renforcement de l'intégration européenne afin d'éviter, le plus possible, les incohérences et l'affirmation des égoïsmes nationaux en lieu et place de l'exigence de solidarité européenne. Or, tout cela ne pourra se faire que si les Etats nationaux et si l'Europe disposent des ressources humaines pour produire ces règlementations et pour contrôler leur application. Cela nécessitera des fonctionnaires et des services publics.

Un autre aspect est inquiétant est celui du temps imparti aux Etats en difficulté pour résoudre leurs problèmes. Trois ans pour ramener les déficits et les endettements à des niveaux acceptables risquent d'être court pour assurer la réussite. Le redressement, pour qu'il soit durable, requiert du temps car l'économie est une variable dont les temps de réaction sont lents. Plutôt que d'imposer des mesures drastiques sur une période courte, solution brutale qui peut conduire au terrassement du patient ( augmentation du chômage, des faillites, croissance des taxes,...) au lieu de le guérir, il aurait été plus sage de se donner du temps pour pouvoir absorber les efforts requis plus facilement tout en donnant le temps a l'économie de se renforcer progressivement et durablement.

Enfin, on peut s'interroger sur l'idée de remplacer le remboursement de la dette par une forme de restructuration qui manifesterait la solidarité des créanciers privés d'une part, et des Etats et Gouvernements d'autre part, en acceptant d'alléger le fardeau de la dette des Etats en difficulté. Il y aurait là un moyen de contribuer au sauvetage solidaire de l'Union plutôt que de laisser croître les difficultés avec le risque d'effondrement et la perte totale qui pourrait en résulter...

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