La publication récente du livre de l'ancien journaliste français, Jean-Francois Kahn intitulé "Menteurs" soulève la question essentielle de la vérité en politique. La thèse de l'auteur, telle que j'ai pu la comprendre lors de l'interview donné par J.F. Kahn à Radio-Canada le dimanche 4 février dans le cadre de l'émission « Samedi et rien d'autre », est que les politiciens ne disent pas la vérité notamment au moment des campagnes électorales. Il désigne les contraintes qui, à son avis, poussent les responsables politiques au mensonge.
Je ne peux guère analyser le contenu de ce livre car je ne l'ai pas encore lu. Je voudrais seulement soulever un point de fond : celui de l'existence de la vérité en politique. Ma thèse est qu'il n'y a pas de vérité absolue en matière de politique. En conséquence, attendre des politiciens qu'ils annoncent des vérités ne peut conduire qu'à des désillusions. La politique, en effet, n'est pas une science exacte comme peuvent l'être la Physique ou les Mathématiques. On doit d'ailleurs reconnaitre que, même dans le domaine de ces sciences, dites exactes, la vérité n'est pas immuable et peut toujours être remise en cause par la recherche. Pensons, par exemple, au postulat d'Einstein sur l'impossibilité de dépasser la vitesse de la lumière qui vient d'être remis en cause par des expériences récentes... Dans la société moderne, société de l'information et de la communication, les programmes politiques sont constamment soumis a l'analyse d'experts de tous bords qui ne cessent de se contredire. La simple "vérité" qui voudrait considérer qu'il est bon qu'un pays endetté réduise sa dette par une politique de rigueur budgétaire ne fait pas consensus parmi les experts. Pour certains c'est même une hérésie. Selon ces derniers, il vaudrait mieux favoriser la relance de la croissance par tous les moyens plutôt que de mettre en oeuvre une politique de rigueur qui risquerait d'entrainer le pays dans la récession... Autre exemple : avant la dégradation de la note de la France par l'Agence Standard and Poor's, le Président Sarkozy et de nombreux politiciens expliquaient que cela était inconcevable et que ce serait placer la France dans une situation catastrophique. Or, on constate aujourd'hui que cette dégradation n'a pratiquement rien changé à la situation de la France sur les marchés financiers...
Tout cela pour dire qu'il n'y a pas de vérité absolue en matière de politique. Alors, direz vous, que doit on attendre des responsables politiques s'il ne peuvent se baser sur des vérités ? A mon avis, ce que l'on doit attendre de ces responsables c'est qu'ils nous indiquent LEUR vérité propre et pas LA vérité. Ils doivent nous dire ce qu'ils veulent faire et pourquoi ils veulent le faire. La crise politique contemporaine a pour cause, à mon avis, l'absence de vision des responsables politiques qui sont trop tentés d'écouter les experts et de vouloir plaire a leurs électeurs.
Si en juin 1940, le Général De Gaulle avait écouté les "experts", peut on croire qu'il aurait lancé son appel à la résistance, le 18 juin de cette année? Peut-on croire que Mao-Tse-Toung a écouté les experts au moment de se lancer dans l'aventure incroyable de la "longue marche" ? On pourrait multiplier les exemples de ce type tant en temps de guerre qu'en temps de paix. Les politiciens doivent avoir des projets, une vision pour l'avenir qui les portent, ils ne doivent pas se laisser mener par les sondages ou influencés par les experts...
Il n'y a pas d'autres voie pour l'avenir que de voter pour des personnes qui ont foi en leur programme politique, pour des porteurs de grands projets politiques. La tristesse aujourd'hui est liée à la rareté de ces responsables. On ne peut qu'être pessimiste lorsqu'on constate, par exemple, que même un aussi grand projet que la construction européenne, projet initié par des hommes visionnaires, que ce grand projet ne trouve plus aujourd'hui de leader capable de relancer sa construction avec enthousiasme et clairvoyance.
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